9 Mars 2025
Le plateau est vide juste deux formes un peu sarcophage, annoncées comme deux chouettes, immobiles qui animent le fond de scène. ET puis comme une naissance ces deux œufs/ sarcophages accouchent d’un homme et d’une femme qui par le jeu des lumières et des reflets vont perpétuellement changer de couleur et d’aspect tout le long du spectacle.
Je dis fable car le spectacle est annoncé comme tel et à partir de 8 ans. D’ailleurs certaines scènes ont fait mourir de rire les enfants mais pas forcément pour ce qu’elles étaient. C’est une fable oui car les fables mettent souvent en scène des animaux personnifiés, permettant d'aborder des sentiments tout en reflétant les mœurs de la société. Ainsi, la fable combine divertissement et enseignement moral, utilisant des personnages symboliques pour transmettre des vérités sur la nature humaine et les relations sociales. En ce sens nous sommes bien dans une fable, d’ailleurs Caroline Breton le sait très bien puisqu’elle a fait des études de philosophie. Elle nous donne à voir des petites scènes qui s’enchainent à un rythme soutenu sans vraiment de fil conducteur ou alors il m’a échappé, et pour finir les deux personnages retournent d’où ils viennent c’est-à-dire dans leur coquilles / enveloppes et la boucle est bouclée. Pour rester dans le contexte enfance on pourrait résumer par "trois petits tours et puis s'en vont...". On peut aussi imaginer que ce spectacle est comme un rêve ou une parenthèse où les codes et les interférences sont particuliers tout en nous parlant de nous. Prendre de la distance pour mieux se projeter.
A souligner la qualité de la mise en lumière de Charles Chemin qui donne toute sa saveur au spectacle en transformant personnages et scène à chaque tableau.
Le côté « candide » pour faire passer un message
Caroline Breton est intéressée « par la métamorphose incessante du vivant » et la fluidité avec laquelle la vie se développe, inventant de nouvelles formes, parfois cocasses et incongrues et surtout s’adaptant à tout. Elle pose la question de l’impulsion vitale. Qu’est-ce qui nous anime, nous met en mouvement ? En somme, l'action humaine est le résultat d'une interaction complexe entre motivations personnelles, structures sociales, valeurs culturelles et facteurs biologiques.
Ce spectacle essaie d’y répondre sous une forme un peu ingénue, essayant l’humour et le second degré qui est je crois la chose la plus difficile en danse. Mais ce côté candide sonne cependant juste lorsque l’on veut traiter d’un sujet aussi complexe.
Elle s’entoure de créateur.rices, placticien.ne, aquarelliste, éclairagistes, compositeur.ices qui donnent vie à cette approche naïve et poétique. Parce que bien souvent on associe naïveté à poésie alors que la poésie peut être une affaire extrêmement sérieuse. Du coup plutôt que candide j’aurai pu dire poétique mais je garde les deux notions associées sans les confondre, ni les mixer. Car le terme candide désigne une personne qui possède une pureté d'âme et une naïveté souvent associée à une confiance excessive. Il provient du latin candidus, signifiant blanc et symbolisant la pureté.
La poésie comme moteur créateur.
La poésie privilégie l'expressivité de la forme, où les mots transmettent plus que leur simple sens par leur choix et leur agencement. La poésie comme une figure de style chorégraphique revient à reconnaître la capacité de la danse à incarner des qualités poétiques, utilisant le mouvement pour créer des métaphores visuelles, évoquer des émotions profondes et raconter des histoires de manière non verbale. La danse et la poésie se rapprochent dans leur quête commune de l'expression de l'expérience humaine. Ainsi la poésie touche à l’universalité des sentiments humains. La poésie agit comme un véritable réservoir d'émotions et de créativité, permettant d'exprimer des sentiments profonds et d'explorer des mondes inexplorés à travers des images évocatrices et un rythme musical qui nourrissent l'âme et libèrent l'esprit. Que ce soit par les mots ou le langage du corps, la poésie est un véritable moteur créateur qui permet d’explorer les profondeurs de l’âme humaine, d’exprimer des émotions et de renouveler notre rapport au monde et à l’imaginaire.
Ainsi ce spectacle joue sur ces deux lignes candeur et poésie que l’ont retrouve tout au long de la chorégraphie mais il y manque la petite étincelle, le petit quelque chose qui pourrait le faire décoller. On reste un peu sur sa fin.
Distribution
Chorégraphie : Caroline Breton
Interprètes : Caroline Breton & Olivier Muller
Création sonore et interprète : Benoist Bouvot
Création lumière : Charles Chemin
Assistante : Agathe Vidal
Costumes et objets chorégraphiques : Chloé Bellemère
Collaboration aux lumières et régie générale : Simon Gautier
Costumes : Alexandra Sebbag assistée de Lola Barrett
Les costumes sont librement inspirés du travail d’Andreas Senoner.
Tournée