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Arts-chipels.fr

Les Clés du Festival. Avignon expose son Festival.

Programme, Semaine d'Art en Avignon, 1947 - fonds association Jean Vilar La Semaine d’Art deviendra le Festival d’Avignon à partir de 1948.

Programme, Semaine d'Art en Avignon, 1947 - fonds association Jean Vilar La Semaine d’Art deviendra le Festival d’Avignon à partir de 1948.

La Maison Jean Vilar et la Bibliothèque nationale de France, qui disposent d'une collection d'archives uniques sur le festival d'Avignon, créent à Avignon une exposition permanente consacrée au Festival, depuis sa création en 1947 jusqu'à l'époque contemporaine.

Le Festival entamera sa 78e édition en 2025. Si l’on se retourne vers l’arrière, il y a un énorme écart entre le Festival créé par Jean Vilar au cours de la Semaine d’art, dédiée à l’art contemporain, au cours de laquelle le metteur en scène monte Richard II de Shakespeare dans la Cour d’honneur du Palais des Papes devant 6 000 spectateurs et le Festival d’aujourd’hui avec ses 250 lieux environ, 1 500 spectacles et près de 1 200 compagnies pour un public proche du million de spectateurs. Une croissance monumentale qui fait aujourd’hui du festival d’Avignon – et encore, en dépit des critiques, nombreuses, qui lui sont faites depuis nombre d’années – un lieu incontournable du spectacle vivant, et plus particulièrement du théâtre.

Le festival d’Avignon est inséparable de notre histoire culturelle et artistique. En scruter les différentes étapes, la programmation, le fonctionnement et la « machine » Festival offre l’opportunité de questionner non seulement les conditions qui ont permis cette croissance hors du commun mais aussi de nous interroger sur le projet artistique et culturel – qui a évolué au cours du temps – que sous-tendait cette manifestation, hors les murs de la capitale. À travers l’histoire du festival d’Avignon se raconte aussi l’histoire de ce qu’on qualifie à l’étranger d’« exception culturelle française ».

. Le Roi Richard II, Richard II, interprété par Jean Vilar, maquette Léon Gischia, 1947,  fonds association Jean Vilar, © Adagp, Paris, 2025

. Le Roi Richard II, Richard II, interprété par Jean Vilar, maquette Léon Gischia, 1947, fonds association Jean Vilar, © Adagp, Paris, 2025

Au commencement était la culture populaire pour toutes et tous…

Replacer l’histoire du Festival dans les années d’après-guerre permet d’éclairer les motivations qui président à sa fondation. C’est sous la IVe République, en janvier 1947, qu’est créé le ministère de la Jeunesse, des Arts et des Lettres, indépendant de la tutelle de l’Éducation nationale, mais déjà Jean Zay, à la fin des années 1930, esquissait le projet d’un « ministère de la vie culturelle » dont le programme sera repris à la Libération dans le programme de l'Organisation civile et militaire issue de la Résistance. Quoique éphémère, avant de retourner sous son ancienne tutelle, c’est sous ce ministère qu’est créé le premier Festival d’Avignon, soutenu par Jeanne Laurent, nommée sous-directrice des Arts et Lettres.

Résistante auprès de Germaine Tillion, elle a par le passé partagé les vues de l’association Jeune France, mise en place durant l'Occupation par Pierre Schaeffer et Emmanuel Mounier, avant d'être jugée trop contraire à la politique du gouvernement. Dans la continuité des préconisations de Jean Zay, cette association, véritable préfiguration d’un ministère de la Culture, compte dans ses rangs un certain Jean Vilar.

Guidée par la volonté de donner à tous l’accès à la culture, Jeanne Laurent crée les premiers centres dramatiques nationaux décentralisés et participe à la fondation du festival d’Avignon. Jean Vilar n’est pas encore le directeur du Théâtre National Populaire créé par Firmin Gémier en 1920 – il le deviendra en 1951, pérennisant trois règles : un prix très peu élevé des places ; un choix d’œuvres classiques ou contemporaines « appartenant au répertoire "le plus haut, voire le plus difficile" », et le recours aux meilleurs interprètes.

Manifestations en début de Festival, juillet 1968 – Photographie Maurice Costa © succession Costa

Manifestations en début de Festival, juillet 1968 – Photographie Maurice Costa © succession Costa

Une histoire à rebondissements

La suite de l’histoire est marquée d’évolutions, de crises – parfois – et de rebondissements. 1951 marque les triomphes du Prince de Hombourg et du Cid avec Gérard Philipe tandis que retentissent pour la première fois les trompettes de Maurice Jarre. En 1964, Vilar a laissé la direction du TNP à Georges Wilson dont les spectacles sont joués à Avignon tandis que Vilar inaugure le principe des « Rencontres » qui rassemblent concepteurs et animateurs des politiques culturelles publiques, intellectuels, universitaires et artistes. En 1966, la danse, avec Maurice Béjart et son Ballet du XXe siècle, fait son entrée, tandis qu’André Benedetto, au Théâtre des Carmes lance, avec André Hunault, la première manifestation du festival indépendant, « non officiel », après avoir publié un manifeste prônant « les classiques au poteau » et « la culture à l'égout ». 1968 est, malgré le développement du « off », le festival de toutes les contestations, en particulier avec le Living Theatre de Julian Beck et Judith Malina qui revendique un théâtre gratuit et révolutionnaire, mais c’est aussi la première apparition de la musique contemporaine au cloître des Célestins.

En 1982, c’est dans une Cour d’honneur repensée qu’Ariane Mnouchkine et le Théâtre du Soleil proposent un Richard II en version japonaise et la Nuit des rois en version indienne. En 1985, Peter Brook investit, l’espace de toute une nuit la carrière Callet à Boulbon avec le Mahabharata, dans les senteurs de thym et de sarriette tandis que le dramaturge polonais Tadeusz Kantor présente Qu’ils crèvent les artistes ! au gymnase Aubanel. En 2003, le Festival, annulé en raison d’une grève des intermittents du spectacle, laisse la place à des « États généraux de la culture » – une autre annulation suivra l’épidémie de covid 19 en 2020 et le Festival se réduira à une « Semaine d’Art » à la fin d’octobre.

À travers ces diverses péripéties, le Festival palpite au rythme du monde.

Répétitions de Richard II d’Ariane Mnouchkine, Cour d’honneur du Palais des Papes, 1982 – Photographie Maurice Costa © succession Costa

Répétitions de Richard II d’Ariane Mnouchkine, Cour d’honneur du Palais des Papes, 1982 – Photographie Maurice Costa © succession Costa

Un parcours d’exposition qui reflète les différentes facettes du Festival

Ainsi apparaîtront tour à tour les différents thèmes majeurs qui définissent le Festival. Son histoire d’abord, avec ses débuts, de 1947 à 1968 – les années Vilar – où l’on retrouvera les costumes de la troupe, les voix de Gérard Philipe, de Maria Casarès ou de Jeanne Moreau en même temps que les notes de service, les correspondances de Vilar et les photographies de répétitions.

Une section mettra en valeur les artistes et les créations nationales et internationales qui ont jalonné les années post-Vilar. Sur grand écran, 60 années de créations feront revivre les moments marquants, les spectacles phares, les chocs esthétiques.

Le public du Festival aura son espace, depuis les Rencontres du Verger. Témoignages, photographies, archives personnelles de festivaliers seront ici rassemblés pour témoigner de la fascination qu’exerce le Festival et de l’amour que lui marquent, depuis des décennies, les festivaliers.

Le Festival comme miroir du monde montrera le Festival comme caisse de résonance, des événements de 1968 aux législatives de 2024, écho des mouvements politiques et sociaux qui agitent la société et présence des cultures et des langues du monde entier. Extraits d’actualités et de spectacles, photographies, programmes illustreront cet aspect du Festival.

Une place sera faite au « off », qui débarque au milieu des années 1960. Affiches, tracts, parades, spectacles de rue modifieront la physionomie de la ville, transformée en scène ouverte, en plein air. Le « off » modèlera le paysage d’aujourd’hui, in et hors les remparts de la ville.

Avignon, Ville-Festival, donnera à voir à travers cartes, maquettes et projections la métamorphose de la ville en période de Festival, depuis l’investissement de lieux étrangers au théâtre et de monuments historiques ou religieux jusqu’aux établissements scolaires et gymnases.

Enfin la Fabrique du Festival introduira le public dans l’envers du décor avec tous ceux qui transforment les lieux en théâtres éphémères. Des équipes techniques à celles de la communication, de l’accueil, de la presse, de l’organisation du Festival, l’équipe technique passe de 40 permanents à près de 900 personnes en période de festival.

Saluts du Soulier de satin, Cour d’honneur du Palais des Papes, 1987 – Photographie Maurice Costa © succession Costa

Saluts du Soulier de satin, Cour d’honneur du Palais des Papes, 1987 – Photographie Maurice Costa © succession Costa

Une documentation unique

L’exposition rassemble près de 1 000 documents et archives de la Maison Jean Vilar et des collections de la Bibliothèque nationale de France. Photographies, films, enregistrements sonores, affiches, programmes, notes et correspondances inédites, décors emblématiques, dessins originaux, maquettes et costumes de légende, pièces iconiques et témoignages marquants, histoires artistiques et humaines constitueront une véritable plongée dans les arcanes du Festival.

Permanente, l’exposition débordera de la durée du Festival pour s’installer de manière durable dans les locaux de l’hôtel de Crochans, mis à disposition par la Ville d’Avignon. Compte tenu des nécessités de conservation des documents exposés, elle sera sujette à modifications au fil du temps, ce qui est aisément réalisable compte tenu de la richesse des archives. Son ambition affichée est de prolonger le geste fondateur de Jean Vilar et du Théâtre populaire : être pour toutes et pour tous.

La Cour d'honneur du Palais des Papes lors d'une représentation, juillet 2023  © Christophe Raynaud de Lage

La Cour d'honneur du Palais des Papes lors d'une représentation, juillet 2023 © Christophe Raynaud de Lage

Les Clés du Festival – L’aventure Du Festival d’Avignon des origines à nos jours
Exposition permanente S Commissariat d’exposition et textes Antoine de Baecque S Conseiller scientifique Jean-Baptiste Raze (Département des Arts du spectacle, BnF) S Coordination générale Nathalie Cabrera S Scénographie Claudine Bertomeu S Lumière Jean Bellorini S Son Jean-Louis Larcebeau et Marie Darodes / Demain.org S Graphisme d’exposition Marion Dejean / Madehok S Assistant du commissaire d’exposition Adrian Blancard S Documentation et iconographie Adrian Blancard, Jean-Baptiste Raze, Léna Pabst, Esther Arnaiz-Garcia assistés de Catherine Cazou, Muriel Delage, Juliette Jenta, Sarah Maupetit, Estelle Richard S Conseiller technique Christian Wilmart S Construction Olivier Diacci / atelier Décolive, assisté de Frédéric Tronquoy S Régisseur Maison Jean Vilar Romuald Grandjean assisté de Cyril Sabatier et Pascal Wauquier S Régisseur lumière Nicolas Gros S Production audio-visuelle la Compagnie des Indes S Administration générale et production Tatiana Pucheu-Bayle S Projet pédagogique et médiation Kévin Bernard S Une exposition portée par l’association Jean Vilar / Maison Jean Vilar en partenariat avec la Bibliothèque nationale de France (BnF) S Production association Jean Vilar S Coproduction le Théâtre National Populaire Avec le soutien du Festival d’Avignon S En partenariat avec La Compagnie des Indes, L’INA, Chaillot - Théâtre national de la Danse, Les archives du spectacle, ARTCENA, La Chambre de Commerce et d’Industrie du Vaucluse, Avignon Tourisme, ARTE, France Culture, Télérama, Le Monde, The New York Times, Ici Vaucluse, Zébuline, Sceneweb S Un projet labellisé Avignon - Terre de culture 2025, subventionné par le Ministère de la Culture et la Ville d’Avignon S L’association Jean Vilar est financée par le Ministère de la Culture et la Ville d’Avignon, la Région Sud, le Conseil départemental de Vaucluse, le Grand Avignon et soutenue au projet par la DRAC PACA S Mécènes Crédit Coopératif et Igensia

À partir du 5 juillet 2025. Tte l’année, mar.-sam. 14h-18h. Pdt le Festival (5-26 juil. 2025) : tlj 11h-20h Fermé en août
Maison Jean Vilar - Place de l’Horloge, Montée Paul Puaux  8, rue de Mons 84000 Avignon
www.maisonjeanvilar.org

Programme inaugural du 5 au 26 juillet 2025

RENCONTRES
Donner les clés – cycle de rencontres (programmation en cours d’élaboration) Les 6 et 7 juillet à 11h et 18h. Entrée libre. Durée 1h. Artistes, universitaires, professionnel.les, grands témoins, elles et ils viendront témoigner, débattre et rêver de la belle aventure du Festival d’Avignon, un héritage au présent. Conception Antoine de Baecque et Nathalie Cabrera Production Association Jean Vilar/Maison Jean Vilar, en partenariat avec la BnF et le Festival d’Avignon
Au programme
• Samedi 6 juillet 11h Se souvenir du Soulier de satin d’Antoine Vitez. Avec Yánnis Kókkos, Nathalie Léger
• Samedi 6 juillet 18h Les publics. Avec Laure-Hélène Swinnen, Damien Malinas, Emmanuel Ethis, Margault Chavaroche, François Olislaeger, Frédéric Nauczyciel
• Samedi 7 juillet 11h Exposer, représenter l’histoire du Festival Avec Gildas Leroux, Fanny de Chaillé, Anne Monfort, Julia de Gasquet, Christophe Raynaud de Lage
• Samedi 7 juillet 18h Diriger le Festival. Avec Hortense Archambault, Vincent Baudrillé, Tiago Rodrigues  

SPECTACLE

Jouer avec les fantômes 1 et 2. Les 10 juillet et 11 juillet à 11h et 18h Durée 1h. Entrée libre. 17 jeunes élèves du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique s’emparent des archives de la Maison Jean Vilar et investissent la calade pour faire revivre la formidable troupe du TNP. Une aventure en 2 épisodes • Mise en scène Anne Monfort • Dramaturgie Laure Bachelier-Mazon • Avec les élèves de 2e année du CNSAD-PSL Maxime Allègre, Anahita Bach, Philippe Bertrand, Alexis Bougouin-Joly, Romane Djedjiga, Antoine Cailloux, Claire Chambon, Siriné Cissé, Mathieu Delacour, Etienne Guattari, Dounia Kouyaté, Kataryna Kukhelna, Hanna Manzhura, Mariana Minina, Marina Mouniapin, Matteo Pereir et Fatima Tawakkuli • Production CNSAD-PSL •Avec le soutien de la Maison Jean Vilar, et de la compagnie day-for-night.

LECTURES
Mon Festival, nos festivals, le feuilleton de la Maison Jean Vilar Du 12 au 21 juillet à 11h. Durée 1h. Entrée libre. Conçus en complicité avec Laure Adler, lus par des acteur.ices qui en ont traversé l’histoire, 9 épisodes pour partager les mots des poètes, critiques, artistes, spectateur.ices du Festival d’Avignon des années 50 aux éditions les plus récentes.
• Montage Laure Adler et Nathalie Cabrera • Production Association Jean Vilar/Maison Jean Vilar  •Avec le soutien de la SACD, de la SOFIA et du Festival d’Avignon

PROJECTIONS
ARTE à la Maison Jean Vilar, Retour sur images Du 12 au 14 juillet à 14h30. Entrée libre. En écho à l’exposition Les Clés du Festival, ARTE et la Maison Jean Vilar vous invitent à (re)vivre l’histoire et le présent du Festival d’Avignon, au plus près des artistes et de la création. Une sélection de films suivis de rencontres avec des artistes et des auteurs présents dans cette édition 2025.
Séances présentées et animées par Philomène Bon (journaliste ARTE journal).
• Samedi 12 juillet à 14h30 Le vent souffle dans la cour d’honneur. Les utopies contemporaines du Festival d’Avignon. Documentaire de Nicolas Klotz et Élisabeth Perceval Coauteurs Nicolas Klotz, Élisabeth Perceval et Antoine de Baecque Coproduction La Compagnie des Indes, ARTE France, avec la participation de France Télévisions et du Festival d’Avignon (France, 2013, 1h35mn)
Réalisé à l’occasion de l’édition 2013 du Festival d’Avignon, la dernière dirigée par Hortense Archambault et Vincent Baudriller, un hommage à l’alchimie unique créée entre l’institution, les artistes et le public, par des figures emblématiques du théâtre contemporain. Projection suivie d’une rencontre avec Nicolas Klotz, Elisabeth Perceval et Antoine de Baecque.
• Dimanche 13 juillet à 14h30 Forêt, Film de Evi Cats Coproduction Rosas, Musée du Louvre, Festival d’Automne à Paris, 24images avec la participation d’ARTE France (France, 2025, 43mn) Filmé en novembre 2022 au Musée du Louvre à Paris.
Les chorégraphes Anne Teresa De Keersmaeker et Némo Flouret investissent les galeries italienne et française du Louvre pour y présenter Forêt, une invitation à regarder d’un œil neuf les chefs d’œuvre de l’aile Denon. Projection suivie d’une rencontre avec Anne Teresa De Keersmaeker, Némo Flouret et Laure Adler.
• Lundi 14 juillet à 14h30 Thomas Ostermeier, insatiable théâtre. Documentaire de Jérémie Cuvillier. Coproduction ARTE France, La Compagnie des Indes, Le théâtre de Vidy-Lausanne (France, 2016, 56mn). Réalisée pendant les répétitions de La Mouette d’après Tchekhov au Théâtre de l’Odéon, une plongée au cœur du travail de Thomas Ostermeier. Projection suivie d’une rencontre avec Thomas Ostermeier

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