18 Octobre 2023
Antoine Defoort et ses complices de l’Amicale nous invitent à une excursion en forêt d’un genre pour le moins particulier. De la bonne humeur, de la satire et une pointe d’absurde dans des boîtes qui ouvrent des enveloppes qui contiennent elles-mêmes projections et autres animations. Rationalistes, s’abstenir.
Nous voilà plongés dans décor sylvestre idyllique. Grands arbres dans la demi-lumière qui passe à travers les branches, moquette fleurie au sol, vaches paissant paisiblement sur l'écran qui nous fait face, ça respire le bonheur de vivre dans la nature, le pays de Cocagne, le paradis qu’habitent des oiseaux qui chantent à qui mieux mieux.
L'univers proche et lointain qui rassemble réalité et fiction
Une narratrice apparaît côté jardin. Elle est notre « médiatrice fictionnelle ». Elle doit nous guider à travers une histoire pour le moins insolite. Déjà elle s’amuse, en introduisant les personnages, à nous balader sur les divers sentiers de la conquête du bien-être à travers la pleine conscience de soi et autres concepts qui font florès dans notre univers anxiogène où chacun se raccroche à la branche qu’il peut. Histoire de nous mettre à l’aise, que nous ne soyons pas perdus, elle nous annonce qu’elle sera aussi l’un des personnages de l’histoire – pas possible de ne pas faire la différence entre les deux, elle changera de tenue… Le ton est donné.
Au pays des mnémoprojecteurs et des Pikachu bisounours
Deux amis se retrouvent après trois années. Le premier fait à l’autre un compte rendu de ses activités au sein de la « Plateforme Contexte et Modalité ». Non, non, pas un parti politique mais un groupe qui a grandi au fil du temps, une attitude face à la vie, un bricolage artisanal pour se situer, se rencontrer… Il « éclaire » le débat sur un écran où apparaissent des personnages dessinés qu’il fait se mouvoir grâce à un petit boîtier. Nous sommes dans un futur proche, dans un monde où projeter ses souvenirs grâce à un petit casque qui les capte pour les révéler à l’écran est devenu banal et où les Pokémons®, Carapuce, Psykocouac et autres Hippotrempe sont devenus « logomorphes », des supports de discours.
De la manipulation comme un des beaux-arts
Sur fond de musique rock plus que tonique, et l’air de ne pas y toucher, on s’interroge sur le succès du PCM et ses possibles dérives dès que la médiatisation – nécessaire pour se faire connaître et diffuser son message – s’en est emparé. Faut-il accepter le débat avec l’épouvantable Erwan Dubreucq qui a tôt fait de réduire la réflexion à des slogans simplificateurs qui interdisent, de fait, toute discussion et toute ouverture ? Le PCM ne s’est-il pas fait « escarbouiller » dans ce qui ressemble fort à un jeu de dupes ? Les personnages sont on et off, mannequins et hommes et femme de chair et d’os dans un univers où les concepts se télescopent joyeusement, et où la sylvothérapie, la magie paradoxale, la lévitation, les extraterrestres de John Carpenter et les effets placebo sont de la partie.
On l’aura compris. Dans la logique parfaitement déjantée et science-fictionnelle d’Antoine Defoort, réalité et fiction forment un mélange détonnant fun and friendly – les termes anglais sont légion et font la nique au « restons français » – plein de digressions réjouissantes. Le public ne s’y trompe pas. On s’amuse beaucoup…
Elles vivent
S Conception Antoine Defoort S Collaboration artistique Lorette Moreau S Avec Sofia Teillet, Alexandre Le Nours, Antoine Defoort et Arnaud Boulogne S Régie générale Simon Stenmans S Création sonore Mélodie Souquet S Création musicale Lieven Dousselaere S Scénographie Marie Szersnovicz S Production Alice Broyelle et Thomas Riou S Regard extérieur Stephanie Brotchie S Bricolage Sebastien Vial et Vincent Tandonnet S Conception du robot de la réforme du fliflifli Kevin Matagne S Conseiller logomorphe Esprit de la Forêt S Photos Matthieu Edet S Production l’Amicale S Coproduction Le Phénix Scène Nationale de Valenciennes Pôle Européen de Création / Theatro Nacional D.Maria II - Lisbonne / Atelier 210, Bruxelles / Le Centquatre-Paris / Malraux, scène nationale Chambéry Savoie / Maillon, Théâtre de Strasbourg – Scène européenne / Le Bateau Feu - Scène nationale Dunkerque / Le Vooruit - Gand / le Vivat, Scène conventionnée d’intérêt national art et création... Soutien : Théâtre de Poche, scène de territoire pour le théâtre / Bretagne romantique & Val d’Ille-Aubigné / Buda – Courtrai S Création en mars 2021 au Cabaret de curiosité / Le Phénix – Valenciennes
TOURNÉE 2024
18 janvier 2024 Le Théâtre, Scène nationale de Mâcon