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Arts-chipels.fr

Offrandes théâtrales, musicales et dansées au Théâtre de la Ville

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La réouverture progressive des lieux culturels aura été marquée, au Théâtre de la Ville, par le retour du spectacle vivant. Une grande émotion, partagée aussi bien par le public que par les artistes en scène.

Tout au long de la semaine qui vient de s’écouler, le Théâtre de la Ville a inauguré ce retour à un monde d’avant, largement revisité et reconsidéré au filtre de l’expérience et des apports de ces presque quatre mois d’absence physique. Un face-à-face à la fois attendu et un peu redoutable tant l’appréhension du monde d’après représente une rupture. Les retrouvailles étaient donc prudentes mais attendues. La situation géographique de l’Espace Cardin, au centre d’un jardin autorisant les manifestations extérieures les a favorisées. Dedans-dehors ces liens qu’on a renoués, alternant les premiers contacts avec la salle et les représentations sur une estrade d’occasion dans l’espace café-restauration. Ils se sont faits dans la joie d’un espace retrouvé. Ce territoire, acteurs, musiciens, danseurs et intervenants de toute sorte se le sont approprié avec un bonheur manifeste.

Divine Divine Comédie

Quoi de plus magnifique pour ces nouveaux premiers pas dans un théâtre, avec la distance de rigueur, que de redécouvrir, de réécouter, de refaire sienne la Divine comédie de Dante, lue et commentée par Serge Maggiani. S’imprégner de la magie de ce beau texte, en percevoir toute la poésie dans le parcours que le comédien, décidément extraordinaire lecteur, nous a proposé mi- en français, mi- dans la langue d’origine avec la musique qu’elle charrie. Nous nous sommes laissé emporter sur les terres florentines, à la remorque de Béatrice et de Boccace. Intense émotion qui passait de la scène à la salle et vice-versa. Invisible toile tissée dans l’or de la lumière qui signait le retour du spectacle vivant. Un retour qui méritait d’attendre trois heures du matin pour le trouver et débouchait sur la naissance de l’aube.

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Camus dans tous ses états

La « grande » ouverture après les « Veillées », attendait, elle, le week-end et les rencontres consacrées à Albert Camus. Initialement prévues sur le lieu de résidence de l’écrivain, Lourmarin, et empêchées matériellement de se tenir dans ces terres méridionales, elles ont été accueillies dans l’espace du théâtre avec la complicité de l’association des amis d’Albert Camus et la participation de France Culture qui a intégralement retransmis ces deux journées. Lectures encore, dans l’espace de la Grande salle – ponctuées de pauses musicales raï et tsigane rappelant cet ailleurs « étranger » qui n’a cessé de hanter l’écrivain –, séquences où se sont succédé des timbres aussi divers que ceux d’Abd al Malik, accompagné à la basse par Izo Diop, de Charles Berling, de Stéphane Olivié Bisson qui présentera les Carnets de Camus au Lucernaire la saison prochaine, de Valérie Dashwood ou de Sharif Andoura, qui sont autant de visions du monde. Polyphonies de voix pour une symphonie rassemblant des regards sur l’écrivain, de l’enfant pauvre vouant à sa mère et à l’Algérie un amour sans borne à l’auteur s’insurgeant des allégeances contre nature des intellectuels au régime soviétique en passant par le révolté, par son sentiment de solitude profonde et sa relation relativement problématique avec les femmes. Fragments de textes, de journaux intimes, de témoignages ont contribué à éclairer cette personnalité complexe, résolument en dehors du bien-penser de son époque et tragiquement disparue.

Du théâtre avant toute chose

Et puis retour au théâtre avec une représentation de l’État de siège, oratorio, créé par Emmanuel Demarcy-Mota et la troupe du Théâtre de la Ville en 2017, revisité l’année suivante avant une tournée à travers le monde. Une pièce qui met en scène une peste métaphorique dans un monde aux allures totalitaires que seules les valeurs humanistes, la révolte individuelle et l’amour permettent de combattre. Vision prémonitoire qui résonnait étrangement en ces temps d’après – du moins on l’espère – la catastrophe. Là encore, les retrouvailles avec le théâtre étaient placées sous les auspices d’un théâtre en train de se faire. Un décor absent, composé des restes des Sorcières de Salem, des chaises disposées en demi-cercle et des acteurs munis de leur texte qui s’avancent et s’effacent selon les besoins. Quelle plus belle manière de revenir au théâtre que d’en montrer l’essence, de remonter à la source, aux aèdes et conteurs autour desquels on se pressait pour entendre les histoires ?

À travers toutes ces manifestations, ce qui court, comme un lien invisible mais néanmoins présent, c’est l’intensité de l’émotion et le plaisir mutuel de se retrouver, après un long moment d’absence, de partager en direct les plaisirs complémentaires que procure la représentation aux spectateurs comme aux acteurs. Si le Théâtre de la Ville choisit, parce qu’il le peut, d’avoir une programmation durant les mois d’été, avec des concerts sur la scène extérieure, des Consultations poétiques, musicales et dansées et en août une académie Santé-Culture, et avec des représentations théâtrales en salle (voir le programme de juillet ci-dessous), n’oublions pas tous ces autres théâtres encore fermés, ces acteurs et tout le petit monde du spectacle dont les communications, ateliers, retransmissions de pièces et autres actions ont alimenté et allégé nos longs moments de solitude. Au monde du spectacle dans son ensemble, il convient de dire MERCI !

Espace Pierre Cardin 1, Avenue Gabriel – 75008 Paris

Théâtre de la Ville, aux Abbesses – 31, rue des Abbesses – 75018 Paris.

Tél : 01 42 74 22 77. Site : www.theatredelaville-paris.com 

TARIF UNIQUE : 10 € / Gratuit pour les moins de 14 ans & le personnel soignant

1er – 4 juillet aux Abbesses - Les Séparables de Fabrice Melquiot, mise en scène Emmanuel Demarcy-Mota (à partir de 7 ans). Roméo et Juliette des temps modernes, Romain et Sabah s’aiment et voudraient rester ensemble pour toujours, malgré les différences qui opposent leurs familles.

7-11 juillet à l’Espace Cardin -  Alice traverse le miroir de Fabrice Melquiot d'après Lewis Carroll, mise en scène Emmanuel Demarcy-Mota (à partir de 8 ans). Dans la suite des aventures d'Alice, l’autre côté du miroir est un peu plus inquiétant que le pays des merveilles, mais on y déploie un imaginaire sans limite.

8-11 juillet aux Abbesses - Venavi ou pourquoi ma sœur ne va pas bien de Catherine Verlaguet d'après Rodrigure Norman (à partir de 7 ans). L’histoire d’une petite fille qui attend que son frère jumeau rentre à la maison pour pouvoir grandir avec lui et des mensonges que l'on dit pour protéger nos enfants.

16-18 juillet aux Abbesses - Udo complètement à l'est de et par La Cordonnerie (à partir de 8 ans). Une lecture décalée de l'histoire de Blanche-Neige. Un voyage fantasque, complètement à l’Est, jusqu’au fin fond de l’URSS.

22-29 juillet aux Abbesses - J'ai trop d'amis de David Lescot – Création initiée par le Théâtre de la Ville. L’entrée en 6e, les peurs, les agacements, les amis, les faux amis… et la grande question d’être ou ne pas être populaire (à partir de 10 ans).

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