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Arts-chipels.fr

Mellowing. À petits pas.

Phot. © Jubal Battisti

Phot. © Jubal Battisti

Christos Papadopoulos fait osciller en douceur l’ensemble Dance On, sur la musique électro hypnotique de Coti K, dans un mouvement perpétuel fascinant.

Un ballet pour danseurs matures

L’ensemble Dance On, fondé à Berlin en 2015 par Madeline Ritter dans le but d’attirer l’attention sur la question du vieillissement en danse, réunit des professionnels de plus de quarante ans, âge critique pour les danseurs. La troupe s’est constitué un répertoire de pointe, en faisant appel à des chorégraphes de renom comme Deborah Hay, William Forsythe, Jan Martens. En anglais, dance on signifie « continuer à danser », ce qui est fort possible à tout âge, comme le prouvent les onze interprètes de Mellowing commandé à Christos Papadopoulos

L’artiste grec, diplômé de la School for New Dance Development d’Amsterdam et de la National Theatre of Greece Drama School à Athènes, a intégré la compagnie de Dimítris Papaïoánnou. Il y restera douze ans, avant de créer ses propres pièces. Dès ses premières chorégraphies, il développe un style minimaliste original, en prise sur les phénomènes naturels qu’il a observés enfant, dans son Péloponnèse natal : roulis des vagues dans Elvedon (2016), murmurations des oiseaux avec Ion (2018), ramifications souterraines des végétaux pour Mycélium (2024). Ici, il s’intéresse à ce qui peut mettre en mouvement et relier des interprètes expérimentés, aux corps façonnés par une longue carrière.

Phot. © Jubal Battisti

Phot. © Jubal Battisti

Seuls ensemble

Une danseuse s’aventure dans la demi-obscurité, silhouette hésitante. Une autre la rejoint, tout aussi perdue dans l’immensité blanche du plateau, limité au lointain par un écran immaculé où se projettent les ombres. Cueillant au sol un appareil auditif, et le portant à l’oreille d’un geste ludique, la plus âgée déclenche la bande son. Par de subtiles variations, la partition du compositeur italo-grec Costantino Luca Rolando Kyriakos, alias Coti K, complice de toujours du chorégraphe, lance des boucles sonores qui mettent en branle les interprètes, chacune pour soi, timidement, d’abord, puis ensemble, comme encouragées l’une par l’autre à bouger. Elles esquissent de petits pas sur place, puis, traînant des pieds, avancent avec lenteur. Un par un, d’autres artistes se risquent sur scène et, pris dans le même rythme, imitent leurs imperceptibles déambulations.

Bientôt au complet, la troupe est un ensemble d’isolats oscillants qui, sporadiquement cherchent le contact de quelqu’autre. Une foule de corpuscules animés d’une gestuelle uniforme, surfant sur les nappes monotones de la musique électronique. La partition se complexifie, en même temps que danseurs et danseuses amplifient leurs mouvements par des déhanchés et des balancements de bras. Dans leurs costumes accordés, aux tonalités grises et noires, bien ancrés au sol et évoluant avec une mobilité réduite, ces individus dansant dessinent l’espace à l’unisson, dans le tic-tac de la musique, comme les pions d’un jeu de go épars.

Phot. © Jubal Battisti

Phot. © Jubal Battisti

Faire groupe

Devenues plus percussives, les boucles sonores poussent les interprètes à se rapprocher imperceptiblement, jusqu’à former un bloc homogène, en « v », comme des oiseaux migrateurs, chacun relayant ses congénères à la tête du groupe. Rassemblée, la troupe gagne en puissance, prend son essor et chaque individu semble y trouver une plus grande liberté de mouvement. Belle apothéose finale, dans un jeu de lumières colorées qui fait vibrer et démultiplie les ombres  gigantesques des interprètes sur l’écran en fond de scène.

C’est sur ce feu d’artifice que se conclut cette heure intense où les onze partenaires à l’écoute les uns des autres, échangent leur savoir-faire, négocient leurs positions sans jamais se toucher. Mellowing, « maturation  » en français, porte bien son titre. Le public doit lui aussi rester attentif au moindre détail de cette pièce exigeante et hypnotique, dans la lignée de la danse postmoderne américaine des années soixante-dix.

 

Mellowing
S Chorégraphie Christos Papadopoulos S Directeur artistique Dance On Ensemble Ty Boomershine S Interprètes Ty Boomershine, Javier Arozena, Alba Barral Fernández, Anna Herrmann, Emma Lewis, Gesine Moog, Miki Orihara, Tim Persent, Jone San Martin, Marco Volta, Lia Witjes Poole S Assistant chorégraphe Georgios Kotsifakis S Musique Coti K S Lumières Eliza Alexandropoulou S Costumes Werkstattkollektiv S Directeur technique Martin Beeretz S Son Mattef Kulhlmey S Directrice de production Hélène Philippot S Coordinatrice de production Anastasia Luck S Production DANCE ON / Bureau Ritter S Coproductions Centre Culturel Onassis Stegi (Athènes), Centre Chorégraphique National de Rillieux-la-Pape / Direction Yuval Pick (dans le cadre de l’accueil-studio)
Du 20 au 22 mars 2025 dans le cadre du Festival Séquence Danse Paris
Au CentQuatre, 5, rue Curial Paris 19 T.0153 35 50 00

Le 12 avril 2025 Osterfestival Tirol (Autriche)

Séquence danse se poursuit jusqu’au 13 avril 2025

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