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Arts-chipels.fr

L’Harmonie des genres. What a mess du côté des sexes !

L’Harmonie des genres. What a mess du côté des sexes !

Noémie de Lattre propose, avec ses complices musiciennes de haut vol, un parcours enlevé, commenté et drolatique à travers les billevesées, calembredaines et coquecigrues qui escortent les femmes – et les hommes – qui se frottent à l’amour et au sexe en ce début du XXIe siècle.

C’est le bordel, le boxon, le bobinard, le claque dans le foutre et la fornication depuis que les femmes se sont mises en tête – et en cul – après avoir arraché le droit de vote, non seulement de disposer d’elles-mêmes, mais aussi d’avoir droit à la jouissance et au plaisir. Noémie de Lattre, militante engagée pour l’égalité entre les femmes et les hommes, nous propose, pour faire évoluer les mentalités et sensibiliser le plus grand nombre, une promenade à travers les âges. Remonter le fil du temps pour comprendre comment on en est arrivé là. Et changer en profondeur un précepte ancré au tréfond de notre éducation : la guerre des sexes. Avec ses trois musiciennes-chanteuses, une guitariste, une batteuse, une basse, elle remonte aux sources de ce « monde d’hommes » qui part aujourd’hui à vau-l’eau mais se cramponne encore à nos comportements.

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Petite histoire de la domination masculine

Sans remonter à l’image de la femme préhistorique traînée par les cheveux popularisée par la BD, elle jette un petit regard sur le moment où ça bouge, à la Révolution française. Si les femmes sont sur les barricades et qu’elles réclament les mêmes droits que les hommes, que nenni ! Pas de ça, Lisette, et le Code civil leur fait bien sentir qu’elles sont propriétés de l’homme, comme sa pipe ou son cigare. On peut citer, au passage, pour mémoire et pour le fun, la définition que le Petit Larousse 1905 donne de la femme : « épouse de l’homme ». 1914 : les femmes bossent dans les usines et font tourner l’économie. Ça ne leur donne pas pour autant une once de reconnaissance. En 1963 encore, même si elles ont acquis le droit de vote en avril 1944, elles restent dépendantes de leur mari et il faut attendre 1965 pour qu’elles puissent gérer leurs biens propres et bosser sans l’accord de leur mari. Ajoutez dix ans de plus pour dépénaliser l’avortement. Pas étonnant si c’est si difficile aujourd’hui de faire admettre une égalité.

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Quand les coutures craquent

Noémie de Lattre rappelle avec malice, pour faire bonne mesure, que si les spermatozoïdes chargent, sabre au clair, sur l’ovule, c’est quand même lui qui choisit qui il accepte de recevoir – rappelons, rapport au genre, qu'il reste un peu mec, masculin, même s'il est un pur produit féminin. Mais aujourd’hui, il y a du rififi du côté des sexes et des genres. Les hétéros mâles se sentent atteints dans leur « virilité » ou ne savent plus où se mettre, les femmes sont plus que gênées aux entournures dans le moule dont elles ont hérité, les LGBTQIA+ ont toutes les peines du monde à faire reconnaître leur différence, l’opposition homme / femme a du plomb dans l’aile. Dans ce foutoir où chacun ne sait plus très bien où il est, comment repenser la binarité, cesser d’opposer femmes et hommes, homos et hétéros, célibataires et couples, et tout le reste ?

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La démonstration par le petit bout de la lorgnette

Même si elle n’en pense pas moins, Noémie de Lattre nous plonge dans les petites aventures et les mésaventures du quotidien, les salaires, les réflexions sexistes, la double charge, les problèmes menstruels, obstacles à la libido masculine, la ménopause, sans parler de la grossesse. Avec un humour ravageur elle nous plonge dans ces différenciations rampantes qui séparent hommes et femmes, associe mariage-usage-attelage-héritage dans une ronde du à tu et à toi où jeux de mots et assonances forment un insolent ballet, assimile la culture du couple à celle du compost, ose le parallèle entre le porno et le conte de fées, aborde le thème de l’emprise. Bref, elle nous plonge le nez là où ça ne sent pas bon, réinterroge les évidences, nous prend par la main pour un tour des turpitudes masquées sous de riantes apparences.

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Une explication de texte enlevée

Elle ne manque pas de peps, la rockeuse en paillettes sexy, montée sur ses hauts talons, qui nous fait face, et les trois musiciennes qui l’accompagnent prouvent haut la main, s’il en était besoin, que les femmes aussi savent faire, et bien faire. Elle raconte, avec brio, esquisse quelques pas de danse, et chante. Pas des romances à émouvoir dans les chaumières, mais du rock, dans la violence de son engagement ; du rap, où s’exprime la colère ; du slam qui vous parle à l’oreille pour vous inciter à aller de l’avant. Une explication de texte dépourvue de la condescendance du « donneur de leçon », un langage et des formes à concerner tous les publics, et en priorité les jeunes parce que pour les vieux, s'ils n'ont pas déjà goûté aux saveurs contestataires, les carottes sont un peu cuites en matière de révolution… 

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Plus facile à dire qu’à faire…

Noémie de Lattre ne se contente pas de fouiller du doigt là où ça fait mal, d’aller chercher le monstre, déguisé en petite bête, caché sous le monceau de détritus. Elle s’engage, met à nu ses propres errements, ses absurdités, ses contradictions de tous les jours, ses oscillations entre le désir et le questionnement de ce désir en tant qu’héritage ou qu’expression de son moi profond. Elle exhibe la fragilité qui fait en même temps sa force. Ses questions, ce sont les nôtres, ses hésitations, nous les rencontrons aussi. Quant à sa volonté que les choses changent sans que nous chargions baïonnette en avant pour nous étriper, nous la partageons aussi. Et s’il était besoin de montrer l’efficacité de sa démarche, le teenager qui m’accompagnait en attesterait, dans son projet d’inciter ses copains à voir le spectacle…

L’Harmonie des genres de Noémie de Lattre

S Mise en scène Stéphane Corbin S Avec Noémie de Lattre, accompagnée par Élodie Milo (guitare, chant), Swanny Elzingre (batterie), Cléo Bigontina (basse) S Production NdLA Productions et BB Productions S Durée 1h20

Du 24 septembre au 29 avril 2024, les dimanches à 20h et lundis à 20h30

Théâtre des Mathurins - 34 rue des Mathurins 75008 Paris

Rés. 01 42 65 90 00 - www.theatredesmathurins.com

À noter aussi, à partir du 12 octobre, à l’Essaïon (6, rue Pierre-au-Lard, 75004 Paris, www.esssaion-theatre.com), en format réduit pour trois musiciennes, Elles, un spectacle centré sur les droits de la femme, par les Funambules, dans une mise en scène de Stéphane Corbin, les jeudis, vendredis et samedis à 21h.

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