Mycélium, un ballet organique

Christos Papadopoulos fait onduler le Ballet de l’Opéra de Lyon sur la musique électro répétitive de Coti K, dans un mouvement perpétuel hypnotique

Un chorégraphe de la nature

L’artiste grec, diplômé de la School for New Dance Development d’Amsterdam et de la National Theatre of Greece Drama School à Athènes, a intégré la compagnie de Dimitris Papaïoánnou. Il y restera douze ans, avant de créer ses propres pièces. Dès ses premières chorégraphies, il développe un style original, en prise sur les phénomènes naturels qu’il a observé enfant, dans son Péloponnèse natal : roulis des vagues dans Elvedon (2016), murmurations des oiseaux avec Ion (2018). Ici, il s’inspire du réseau d’échanges et de reproduction des champignons, le mycélium : un ensemble souterrain de filaments ramifiés où se développent des particules aériennes, les spores...

Danseuses et danseurs, soumis à ces mystérieuses liaisons végétales, s’agrègent et se repoussent dans un flux et reflux permanent, telles des molécules dans un vaste champ magnétique.

Un ensemble parfait

Un, puis deux, puis trois danseurs s’aventurent dans la demi-obscurité du plateau nu. Dans la lumière vacillante, ils semblent flotter sur un sol instable, se déplaçant imperceptiblement face au public, par de légers mouvements de hanche. Ils seront bientôt rejoints par une foule de corpuscules animés de cette gestuelle uniforme, surfant sur les nappes monotones de la musique électronique.

Par de subtiles variations, la partition du compositeur italo-grec Costantino Luca Rolando Kyriakos, alias Coti K, complice de toujours du chorégraphe, lance des boucles sonores plus percussives, qui poussent les interprètes à se rapprocher imperceptiblement, jusqu’à former un bloc homogène à géométrie variable, où chacun réplique les gestes des voisins sans jamais les toucher. Ancré au sol et évoluant avec une mobilité réduite, ce magma dansant dessine l’espace à l’unisson, synchronisé au millimètre, jusque dans les moindres mouvements de tête et de bras.

Dans la troisième partie, la musique devient plus concrète et le groupe s’effiloche par lambeaux de trois au quatre individus, comme balayé par la marée ou le vent. On voit ondoyer le rideau du fond de scène sous l’effet d’un ventilateur, on entend les ressacs : nous voilà en pleine tempête. Au gré des sons, des jeux de lumière, les vingt danseurs et danseuses doivent être à l’écoute totale les uns des autres, négocier leurs positions sans jamais s’affronter tout en conservant d’infimes écarts entre eux.

L’écriture minimaliste de Christos Papadopoulos met en tension contraintes et pulsions de vie. Le public doit lui aussi rester attentif au moindre détail de cette pièce à fleur de sensualité, exigeante et hypnotique, qui renoue avec les belles heures de la danse postmoderne américaine des années soixante-dix, sur les musiques de Steve Reich et Terry Riley.

Mycelium
S Chorégraphie Christos Papadopoulos S Musique Coti K S Lumière Eliza Alexandropoulou S Costumes Angelos Mendis SMaîtres de ballet Pierre Advokatoff , Jocelyne Mocogni , Amandine Roque de la Cruz S Avec les danseurs du Ballet de l'Opéra de Lyon  : Marie Albert, Jacqueline Bâby, Edi Billoshmi, Eleonora Campello, Noëllie Conjeaud, Katrien De Bakker, Abril Diaz, Jade Diouf, Alvaro Dule, Bredan Evans, Paul Grégoire, Jackson Haywood, Amanda Lana, Marco Merenda, Albert Nikolli, Leoannis Pupo-Guillen, Anna Romanova, Raùl Serrano Núñez, Giacomo Todeschi et Kaine Ward.

Du 18 au 22 décembre 2024
Théâtre de la Ville Sarah Bernhardt, Place du Châtelet Paris 1er

TOURNÉE
14 et 15 janvier 2025 Comédie de Valence
17 janvier 2025 Espace Malraux, Chambéry
Du 22 au 24 janvier 2025 Scène nationale Bonlieu, Annecy
Les 27 et 28 janvier 2025 Le Volcan, Le Havre
1er février 2025 Concertgebouw, Bruges (Belgique)
Du 25 au 27 mars 2025 Opéra de Lille
Du 20 au 22 mai 2025 Opéra de Rennes