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Arts-chipels.fr

Nomad – un rituel sensoriel, hymne au désert et à la résilience, saisissant !

Nomad – un rituel sensoriel, hymne au désert et à la résilience,  saisissant !

Le début du spectacle est un théâtre d’ombres. Les danseurs en ombre chinoise, alignés, immobiles sur un écran en fond de scène qui affiche une immense image d’un sol craquelé, sec à en mourir avec au-dessus un ciel sans nuage. Les danseurs se mettent en mouvement et les images aussi. Sidi Larbi Cherkaoui nous raconte le désert, le vent, la pluie, le ciel étoilé, la tempête, c’est beau, et c’est aussi parfois brut comme cette nature implacable. Car, il nous raconte aussi la survie qui fait partie intégrante du désert.
Sidi Larbi Cherkaoui parle du spectacle ainsi : « Au début c’est un spectacle assez littéral, mais j’ai voulu travailler la résilience. Ainsi, dans le désert,  si on arrête de bouger, on meurt. J’ai travaillé le mouvement dans ce sens, on doit bouger toujours et encore pour survivre, on doit bouger comme les serpents et les animaux avec ce besoin de survie dans la chaleur, le vent, on n’a pas le choix. »

C’est une danse fluide, organique, animale qui nous parle de la lutte pour survivre, de la lutte pour exister chacun et chacune dans son environnement.

Ainsi, pour Sidi Larbi Cherkaoui danser c’est raconter le désert avec le corps. Les interprètes sont sable, vent, mouvement et sensation à la fois. Ce sont des créatures étranges mi humaines, mi insectes qui se meuvent un peu comme des scorpions, d’autres rampent au sol comme des serpents… On assiste à des combats pour le territoire, pour la survie. SI on perd, on part.

Nomad – un rituel sensoriel, hymne au désert et à la résilience,  saisissant !

Être Nomad ou ne pas être

On est dans un monde aride mais aussi dans un palais où le minéral affleure comme une présence invisible mais omniprésente. Dans la gestuelle des danseurs, on passe de animé à inanimé, du repos au mouvement dans une alternance fluide et ininterrompue. C’est une série de tableaux, tous plus magnifiques les uns que les autres mais où on sent aussi la peur, une menace invisible. Nomad est un hommage à ses racines marocaines dont le désert est un symbole spécifique qui représente l’idée de liberté pour nos imaginaires européens mais « c’est un espace très meurtrier et si on veut y survivre il faut trouver les codes ».  Le désert fait partie de cette mythologie occidentale romantique de l’aventure moderne mais c’est un univers rude et sauvage où la survie parfois est implacable. Aussi, trouver les codes pour survivre y est impératif. Et c’est peut-être l’idée sous-jacente du spectacle finalement. Lorsque l’on devient Nomad, parfois on le choisit mais bien souvent on le subit. Et cette obligation de survie passe par comprendre le mode de fonctionnement de l’endroit où on est. Sidi Larbi Cherkaoui parle de géographie et de paysage plutôt que de culture. Par sa danse, Il décrit le monde qui est autour de lui et c’est cette géographie qui l’intéresse et qu’il nous raconte.

On pense bien évidement au Butô et à Maguy Marin et aussi au soufi. Sidi Larbi Cherkaoui évoque aussi le Kabuki. Dans ce théâtre traditionnel japonais, les acteurs combinent des mouvements de danse, de mime et leurs gestes sont soulignés par un accompagnement d’instruments de musique traditionnels, éléments que l’on retrouve dans Nomad,

Nomad – un rituel sensoriel, hymne au désert et à la résilience,  saisissant !

La musique est aussi une part très importante du spectacle.

Pour Sidi Larbi Cherkaoui, la musique d’un lieu est reliée à ce lieu. C’est une partie intrinsèque de la « géographie » du lieu. La musique est bien sûr également mouvement. Il collabore depuis longtemps avec Félix Buxton qui a fait toute la création musicale, et qui, pour lui, est quelqu’un de très spirituel, connecté au son d’une manière presque religieuse. Ses bandes-son sont des voyages spirituels, comme des prières qui se transforment en poésie, un peu comme le soufisme mais en plus libéré. La musique du spectacle est très variée avec une partition chantée en live par Kaspy N’dia, artiste congolais, magnifique.

Un mot sur les costumes

Jan-Jan Van Essche a créé tous les costumes. Né à Anvers, Jan Jan Van Essche est sorti diplômé de la célèbre école de mode locale en 2003. Il a créé sa propre griffe en 2008 et s’est, depuis, bâti tranquillement une réputation de nouvelle voix de la mode. Il travaille les matières naturelles avec des formes hybrides. Sa création pour ce spectacle sont des costumes assez sobres avec des matières douces et fluides qui rappelle la noblesse des bedouins avec les couleurs du désert. Ce sont des matières souples et mouvantes qui suivent et soulignent les mouvements des interprètes.

Nomad – un rituel sensoriel, hymne au désert et à la résilience,  saisissant !

Sidi Larbi Cherkaoui est un représentant majeur de la danse contemporaine en France.
Son parcours est très atypique. Il vient à la danse tardivement et il raconte que le déclic a été Kate Bush et sa façon de se mouvoir dans ces vidéos. Il débute comme chorégraphe en 1999 dans Anonymous Society, une comédie musicale d’Andrew Wale. Puis il travaille pour des créations avec Akram Khan, Damien Jallet. Il chorégraphie Sutra pour 19 moines bouddhistes en 2008 après un séjour chez les moines Shaolin. En 2009, il travaille avec la danseuse flamenco Maria Pagès. Il crée sa propre compagnie en 2009 Eastman à Anvers. Mais il ne s’arrête pas là. Il continue ces diverses collaborations qui l’inspirent et l’enrichissent. Ainsi, il travaille, entre autre, avec des compagnies de hip-hop et de modern jazz en Belgique et toujours avec son complice Damien Jallet.

Cherkaoui veut dire en arabe « là où le soleil se lève », tout un programme… et ce spectacle nous emporte dans un monde puissant et poétique qui nous laisse profondément bouleversés. Magnifique !

Distribution

Chorégraphie et mise en scène : Sidi Larbi Cherkaoui
Musique originale : Sidi Larbi Cherkaoui, Felix Buxton, Kaspy N'dia

Musique additionnelle : Yarkin featuring The Sufi :Vocal Masters, Al Adhan, Al Qantarah, Fadia Tomb El-Hage, Oli Savill (Percussion), les chants traditionnels des Îles Amami au Japon
Création sonore : Felix Buxton
Création costumes : Jan-Jan Van Essche
Décors : Willy Cessa, Adam Carrée
Éclairages : Willy Cessa, Adam Carrée
Conception vidéo : Paul Van Caudenberg
Avec :
Mabrouk Gouicem, Pol Van den Broek, Kazutomi ‘Tsuki’ Kozuki, Mohamed Toukabri, Nassim Baddag, Maryna Kushchova (Ashotivna), Oliver Tida Tida, Jonas Vandekerckhove, Jonas Garrido Verwerft, Zoe Hollinshead

Tournée :

 

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