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Arts-chipels.fr

Le Chat sur la photo. Une pièce pleine de fantaisie pour domestiquer la peur.

© Christophe Raynaud de Lage

© Christophe Raynaud de Lage

La pièce d’Antonio Carmona mise en scène par Odile Gosset-Grange emprunte au polar ses codes pour les pervertir et les mélanger avec une allégresse réjouissante à des thèmes qui touchent de près les petits.

Quand on a quatre ans et demi, comme Anya, on a tendance à se faire un film quand l’inquiétude s’installe. Or Anya a perdu son copain chat et les drôles de bruits qu’elle entend dans la maison ne contribuent pas à la rassurer. Au contraire. Mais à qui raconter ça quand les parents, visiblement, sont loin de tout ça et pas du tout prêts à lui prêter une oreille attentive ? Heureusement elle a son doudou, Froussard, qu’elle embarque avec elle dans cet espace inquiétant qu’est le grenier, lieu de tous les fantasmes d’autant plus qu’il est interdit. Dans une maison de petit format qui serait comme une maison de poupée, mais à échelle d’enfant, l’aventure prend des allures d’exploration de labyrinthe où les tours de magie font gambader l’imagination. Analogue à ces maisons de bois dont on assemble les pièces, elle se transforme à volonté. On peut s’y faufiler, voire prendre le toit pour le placer sur sa tête ou le transformer en tribune. 

Décalage à tous les étages

L’invention langagière est au rendez-vous et les images sont éloquentes : les étoiles sont flippantes, le chat d’Anya a pris la poudre d’escarpette et le serpent-spirateur prépare son mauvais coup dans la cité du placard à balais ; quant à la mère d’Anya, en pleurs, il lui faut retirer les oignons des yeux pour que ses larmes se tarissent… Comme toujours dans les spectacles d’Odile Gosset-Grange, la fantaisie et une certaine insolence de l’enfance vis-à-vis du monde des adultes sont de rigueur car c’est à travers les yeux d’Anya que nous regardons le comportement erratique de ses parents, qui ne cessent de se chamailler. Séparation possible ou famille monoparentale pointent à l'horizon, mais sans dramatiser ni s'appesantir, et les objets entretiennent avec les situations d’étranges similitudes. Devant l'hypothèse de la rupture des parents, le canapé se divise en deux…

© Christophe Raynaud de Lage

© Christophe Raynaud de Lage

Voir le monde à hauteur d’enfant

Deux personnages occupent la scène : Anya et son doudou Froussard, un objet transitionnel comme en possèdent tous les enfants. Avec lui elle est en confiance, le prend à témoin, invente des dialogues imaginaires, le dote de la parole. Elle est une fille et lui un garçon qui, comme son nom l’indique, s’effraie de tout et l’on apprécie que, pour une fois, le courage et l’audace de braver la peur soient le propre de la petite fille…

Fantaisie enlevée et pleine d’humour, le Chat sur la photo provoque chez les enfants ce délicieux sentiment de peur et cette attirance mêlée d’appréhension qu’ils affectionnent, sous réserve qu’ils soient perçus par eux comme un jeu et restent maîtrisables. La conception de la pièce à hauteur d’enfant laisse apparaître la différence de perception qu’ils ont du monde des adultes et de leur environnement, en particulier urbain, et des sources de stress et d'angoisse insoupçonnées qu'ils peuvent trouver dans une situation anodine. La légèreté du traitement de ces questions « sérieuses » et la dynamique pleine de drôlerie du spectacle, si elle entraîne les enfants, n’en séduit pas moins les adultes.

Le Chat sur la photo
S Texte Antonio Carmona S Mise en scène Odile Grosset-Grange S Scénographie Cerise Guyon S Assistanat à la mise en scène Camille Blouet S Magie Père Alex S AvecMarie-Camille Le Baccon et Guillaume Riant S Production Théâtre de Sartrouville et des Yvelines – CDN Coproduction La Compagnie de Louise, La Coupe d'Or – Théâtre de Rochefort Avec la participation artistique du Studio-ESCA Odile Grosset-Grange est artiste associée au Théâtre de Sartrouville et des Yvelines – CDN Pour écoles, bibliothèques et lieux non équipés Jauge 60 personnes (ou 2 classes) Durée 35 min Dès 4 ans 

Du 2 au 7 avril 2024

Lavoir Moderne Parisien – 35, rue Léon, 75018 Paris. Dans le cadre du Festival Le Lavoir en famille

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