Cheveux. La chevelure prise au piège des normes sociales

Laureline Collavizza et Julie Fonroget lissent tout en les emmêlant  avec un plaisir malicieux les multiples facettes symboliques de ces filaments colorés qui nous couronnent, nous caractérisent et révèlent.

De la calvitie à la longue chevelure objet de fascination, de la raideur bon teint à la boule encombrante et frisée au sommet de la tête, de la chevelure révélée à celle qui doit demeurer cachée, de celle qui dit l’âge à celle qui voudrait bien le cacher, des hommes aux femmes, c’est le champ des poncifs concernant la chevelure qui est mis en lecture, questionné, analysé. Un paysage émerge, qui ressemble furieusement au reflet que nous renvoie le miroir de la société, avec ses impératifs et ses codes.

Reprenant nombre d’histoires où la chevelure occupe la première place, les auteures et comédiennes évoquent tour à tour, entre autres, Samson, privé de sa force – et de sa virilité – en perdant sa chevelure, Mélisande qui emprisonne Pelléas dans les ondulations de son interminable chevelure, les femmes voilées cachant leur « impureté » féminine sous une pièce de tissu ou le chemin fait par ces femmes aux cheveux crépus qui les lissent et les raidissent avant, parfois, de revendiquer leur nature « afro ».

Les extraits et histoires se succèdent à un rythme soutenu, jalonné par la projection, sur un écran qui occupe tout le fond de scène, de citations ou de séquences, tel l’effondrement du temple que provoque Samson avec ses dernières forces puisées dans la repousse de ses cheveux.

On se laisse glisser avec plaisir dans cet aimable divertissement, en regrettant toutefois son caractère fragmentaire qui en fait davantage une suite de sketches sur la chevelure que véritablement une pièce de théâtre. Le propos sociétal dévore la fiction. On peut le regretter.

Cheveux de Laureline Collavizza et Julie Fonroget.

Textes inspirés de Pelléas et Mélisande (Maeterlinck), de la Première épître aux Corinthiens (Nouveau Testament), d’Afro (Brigitte Sombier et Rokhaya Diallo), du Sens du poil (Christian Bromberger), ou de documentaires, l’Importance des cheveux (Christine Höglund), la Grande perte (France culture 2014), Pelos, histoire de cheveux (France Culture 2013).

Du 27 août au 4 octobre, du dimanche au mercredi, 21h

Manufacture des Abbesses – 7 rue Véron – 75018 Paris

www.manufacturedesabesses;com. Tél. : 01 42 33 42 03.