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Arts-chipels.fr

Luce. Une fable poétique et inspirée sur l’ouverture à l’autre et l’impact de l’éducation

Luce. Une fable poétique et inspirée sur l’ouverture à l’autre et l’impact de l’éducation

Cette jolie histoire sans parole, pleine de trouvailles scéniques, est comme un roman d’apprentissage pour enfants de 7 ans et plus. Les enfants, sous le charme, restent attentifs devant le jaillissement des images dans lequel ils entrent de plain-pied.

De la masse informe recouverte d’un tissu qui repose au centre de la scène dépassent deux paires de jambes et de pieds. Caressantes, liées entre elles au point qu’on ne peut définir lesquelles appartiennent à qui lorsqu’émergeront peu à peu de la masse non des visages mais deux masques. Le premier est celui de la mère, masque démesuré par rapport au corps de la comédienne qui le porte. Le second est celui d’une petite fille qui se dissimule dans l’ombre de sa mère. Ni l’une ni l’autre ne parlent. Enfermées dans le mutisme, elles vivent une vie fusionnelle et sans parole.

© Alejandro Guerrero

© Alejandro Guerrero

La parabole de l’apprentissage

Mais voici que survient le moment de l’école. Un troisième personnage, non masqué, apparaît. Aux teintes neutres, inexistantes, de la mère et de la fille, elle oppose une robe d’un superbe rouge vif qui vient faire éclater la couleur dans ce couple refermé sur lui-même. Tandis que la mère, inlassablement, soulève point après point l’aiguille qu’elle manipule, l’enfant découvre un autre monde. C’est celui des lettres que, magicienne, l’institutrice projette comme autant de galets jetés dans la rivière, sur un écran en fond de scène. C’est aussi la nature, qui vient à la rencontre de l’enfant, une forêt enchantée comme la porte d’un nouveau monde. Tandis que la mère, refermée sur elle-même, s’enfonce dans son masque, la petite fille se dédouble. Un visage et un buste apparaissent derrière le masque. Timidement d’abord, avec des pudeurs qui les font se cacher à nouveau avant de reparaître, puis de manière affirmée. Quand le spectacle s’achève, la petite fille se sera dépouillée de sa marionnette pour s’ouvrir complètement au monde…

© Alejandro Guerrero

© Alejandro Guerrero

Des arts pour une esthétique sans faille

Cette fable hautement symbolique est servie par l’inventivité de la mise en scène. Un plateau tournant permet, telle une série de flashes, de créer des ellipses, de montrer une évolution dans le temps. La vidéo est utilisée non comme une toile de fond mais comme un acteur à part entière. C’est sur l’écran qu’apparaissent les jets de lettres de l’institutrice. Sur lui que les points prennent progressivement forme, dessinant un mystérieux paysage avant de former un nom reconnaissable : les lettres qui forment mot « Luce », le nom de la petite fille. Enfin débarrassée de la marionnette qui l’encombre, elle a acquis l’écriture et brodé son nom sur son T-shirt. La musique accompagne un travail scénique sur la marionnette tout à fait remarquable. Un contact entre deux pieds, la caresse d’une main, effectués sur un rythme très lent, laissent voir l’étendue de l’affection qui lie mère et fille. Une simple inclinaison de la tête, un corps qui se rétrécit et se cache derrière le masque suffisent à dire la fermeture au monde, le refuge dans la coquille. L’élongation du corps, au-delà de sa taille normale, derrière la marionnette révèle à l’inverse l’importance qu’il occupe aux yeux de la petite fille.

© Alejandro Guerrero

© Alejandro Guerrero

Le long chemin vers la lumière

Dans les Demeurées Jeanne Benameur, dont le livre a inspiré le spectacle, mettait en scène une mère et sa fille, coupées du monde, silencieuses, ne communiquant pas avec les autres et vivant à l’écart de la société. Elle mettait en évidence un état d’avant la parole, un monde de sensations à l’état brut. Cyrille Louge en reprend l’esprit en racontant l’histoire de cette petite fille en proie à des difficultés d’être, qui comprend peu à peu que le langage nous définit et que la séparation qu’il engendre – il nous fait percevoir la différence, l’altérité– nous ouvre les portes d’un inconnu qui peut être effrayant mais qui, en même temps, est une chance. En faisant l’apprentissage des mots, Luce trouve la lumière, cette ouverture à l’autre qui donne des couleurs au monde. Un message riche et profondément humaniste que les enfants perçoivent avant même de le comprendre dans ce spectacle où le visuel devient langage.

© Alejandro Guerrero

© Alejandro Guerrero

Luce, librement inspiré du roman les Demeurées de Jeanne Benameur (éd. Denoël)

Spectacle pour enfants à partir de 7 ans

Mise en scène et adaptation : Cyrille Louge

Avec : Sophie Bezard, Mathilde Chabot, Sonia Enquin

Conception des marionnettes : Francesca Testi

Scénographie : Cyrille Louge, Sandrine Lamblin

Vidéo : Mathias Delfau

Théâtre Paris-Villette

Du 12 avril au 5 mai 2019

211, avenue Jean-Jaurès – 75019 Paris

Rés. 01 40 03 72 23 – www.theatre-paris-villette.fr

En tournée

8-11 octobre 2019 : Comédie de l’Est, CDN de Colmar (68)

9-10 novembre 2019 : Centre culturel, La Norville (91)

4-5 décembre 2019 : Saison culturelle de Melun (77)

12 décembre 2019 : Le Rive gauche, Saint-Étienne-du-Rouvray (76)

10-14 janvier 2020 : Centre culturel de Dammarie-les-Lys (77)

16-18 janvier 2020 : L’Imprévu, Saint-Ouen-l’Aumône (95)

21 janvier 2020 : Espace Saint-Exupéry, Franconville (95)

26 janvier 2020 : Service culturel, Landivisiau (29)

31 janvier 2020 : La Comoedia, Aubagne (13)

3-4 février 2020 : Carré, Sainte-Maxime (83)

6-7 février 2020 : Pôle Jeune public, Le Revest (83)

11-14 février 2020 : Théâtre en Dracénie, Draguignan (83)

18-19 février 2020 : Centre de Beaulieu, Poitiers (86)

27-28 février 2020 : Scène nationale, Albi (81)

6 mars 2020 : Espace André Malraux, Chevilly-Larue (94)

17-20 mars 2020 : Communauté de communes du Val Briard (77)

1er-2 avril 2020 : Espace culturel Boris Vian, Les Ulis (91)

7-8 avril 2020 : Le Forum, Fréjus (83)

21-23 avril 2020 : Espace Sarah Bernhardt, Goussainville (95)

28 avril 2020 : Théâtre de Corbeil-Essonnes (94)

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