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Arts-chipels.fr

ECHOS, Un voyage sensoriel et musical dans un univers parallèle et poétique.

ECHOS_2021_HD@PaulineMaillet

ECHOS_2021_HD@PaulineMaillet

C’est un objet étrange que ce spectacle à l’intersection d’univers différents et complémentaires, une exploration d’autre chose, une promenade onirique qui nous réchauffe et nous emmène dans un univers parallèle et poétique.

Au tout début du spectacle la scène est noire, juste un looper et un micro sont éclairés. Ce seront les seuls objets présents pendant tout le spectacle. Puis un personnage endormi et plus précisément Mathilda May endormie emplit toute la scène. On écoute son souffle, le rythme de son souffle et Sly Johnson commence son improvisation. Ce rêve éveillé, cette intrusion dans ce monde virtuel, ce monde parallèle où tout est possible, est une collaboration entre plusieurs créateur.trice.s, le rappeur, chanteur Sly Johnson, avec l’auteure et metteure en scène Mathilda May et le vidéaste et plasticien Mathias Delfau. Il faut saluer la performance de Sly Johnson qui improvise tous les soirs seul sur scène avec juste sa voix et son looper.

C’est un dialogue qui mêle improvisations musicales, performances visuelles et poésie sonore. Sly Johnson créé des rythmes tirés d’univers plutôt jazz funk avec parfois des accents de Mory Kanté ou même Youssou N’ Dour. On est dans un univers musical hybride fait de multiples influences. Sly Johnson a fait partie du groupe Saïan Supa Crew et à partir de 2007 après la dissolution du groupe, il entame une carrière solo et collabore avec de nombreux artistes jazz funk mais aussi soul notamment avec les chanteuses Dee Dee Bridgewater, Ayo, Camille et Rokia Traoré. Il collabore également avec les trompettistes Roy Hargrove et Erik Truffaz. Son univers musical est ainsi fait d’hybridations et d’inspirations diverses qui lui donne une place à part dans le monde musical français.

Ce spectacle est un dialogue, un pas de deux entre Mathilda May filmée et jamais présente et Sly Johnson en chair et en os comme on dit. Ces deux personnages interfèrent l’un avec l’autre avec chacun leur partition et leur langage. L’un, ce sont les sons et le rythme et l’autre les images et les animations créées par Mathias Delfau.  On est dans un environnement sans cesse en mouvement, avec des alternances de gros plans et des animations vidéos parfois comiques qui décomposent le corps de Mathilda May, le démultiplient, le grossissent ou le découpent pour ne garder qu’un seul élément. On s’amuse, on est pris par ce jeu de cache-cache entre un homme et une femme virtuelle, entre un être de chair et de sang et un être virtuel, défragmenté, morcelé et taquin.
 

ECHOS, Un voyage sensoriel et musical dans un univers parallèle et poétique.

Exploration du concept de « métavers »

Ainsi on est embarqué dans une expérience de réalité augmentée où la frontière entre le réel et le virtuel se brouille. Là il s’agit bien d’une expérience insolite où l’émotion est bien réelle et non virtuelle. Ainsi, on assiste à notre première expérience d’un spectacle dans un métavers primaire, pour utiliser un concept à la mode en ce moment, sans casque de réalité virtuelle juste avec nos yeux et nos oreilles. Le métavers serait un univers qui réunirait les mondes réel et virtuel. Ce métavers présupposé n’existe pas encore mais intéresse de plus en plus l'industrie technologique. Elle y voit la prochaine étape du développement d'internet. Et Mathilda May comme tous les artistes cherchent à explorer les nouveaux territoires de demain et nous y embarque en « avant-première », explorant cette notion de mélange de réel et de virtuel. On voit bien que l’on n’y joue pas à arme égale et que le réel reste bien « terre à terre » face à un être numérique qui n’a ni règle ni contrainte sauf celles de la technique.
D'autres œuvres culte, comme les films Tron (1982), Matrix (1999) ou, plus récemment, Ready Player One (2018) explorent aussi des univers numériques où la fiction vaut autant, sinon plus, que la réalité. Ce mélange de réalité et de virtuel nous interroge sur les modes spectaculaires de demain. Si chez soi on a accès à de nombreux mondes imaginaires virtuels que restera-t-il au spectacle vivant ? Et bien justement cette dimension du vivant irremplaçable et c’est bien ce qui en fera l’atout principal le côté humain.

ECHOS, Un voyage sensoriel et musical dans un univers parallèle et poétique.

L’exploration et l’invention scénique.

Mathilda May ici explore les possibilités du virtuel dont les seules limites sont la technique et l’imagination bien évidement. La collaboration avec Mathias Delfau nous entraine dans un monde onirique, dépouillé et très sensuel. Le seul matériel utilisé est Mathilda May en personne que l’artiste plasticien découpe, rapetisse, agrandit, défractionne démultiplie sur un fond noir. IL joue avec les effets spéciaux jusqu’à nous donner l’illusion d’autre chose, la sensation du vent, l’illusion de l’eau qui coule, fluide. Une interaction étroite avec Sly Johnson fait toute la magie du spectacle et on assiste parfois à ses errements et tergiversations que le corps transformé et transformiste de Mathilda lui fait subir. Mais c’est toujours drôle, parfois pathétique toujours poétique.

 

Mathilda May, créatrice « touche à tout » magnifique

Mathilda May est une « touche à tout » de génie qui explore toutes les disciplines de la création en une boulimie de succès. Son parcours est très éclectique et innovant. Elle vient de la danse classique puis se tourne vers le cinéma et le théâtre. En 1988, elle obtient le César du meilleur espoir et le Prix Romy Schneider pour son rôle dans Le cri du hibou de Claude Chabrol. Ensuite elle publie un roman paru chez Flammarion, puis elle s’essaie à la mise en scène avec Open Space, un spectacle sans paroles et surtout son deuxième spectacle Le Banquet, récompensé par deux Molières (mise en scène théâtre public, et révélation féminine pour Ariane Mourier). Elle écrit également  une pièce pour Pierre Richard Monsieur X au Théâtre de L’Atelier. Ce spectacle est également récompensé comme meilleur "seul en scène" aux Molières 2020. Elle a reçu la même année, le prix SACD de la mise en scène. Bref une succession de récompense et succès.

Dans cette création elle cherche de nouveau à explorer d’autres univers, elle cherche à faire bouger ses propres limites, explorer d’autres problématiques de mise en scène, à explorer de nouveaux territoires de création.

Cette pièce est un moment à part, une bulle de poésie pleine de tendresse et de bienveillance où il fait bon se poser et se reposer.

Distribution

Autrice et metteuse en scène : Mathilda May
Avec : Sly Johnson
Assistant à la mise en scène : Eric Supply
Créateur vidéo : Mathias Delfau
Réalisatrice vidéo : Pauline Maillet
Créateur lumières : Laurent Beal
Créatrice costumes : Valérie Adda
Créateur design sonore et régisseur son : Guillaume Duguet
Régisseur lumières / vidéo et régie générale tournée : Allan Hove

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