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Arts-chipels.fr

Psychodrame. Lisa Guez et ses drôles de dames dans les méandres du mal-être, féminin mais pas que.

Phot. © Clara Normand

Phot. © Clara Normand

Psychodrame explore des histoires de femmes blessées, soignées et soignantes, qui entrent en résistance dans une forme d’utopie. Une mise en jeu jubilatoire et libératrice dans une dynamique documentée et réjouissante.

Une salle d’hôpital comme il en existe des milliers. Anonyme, avec sa cloison aux teintes neutres percée d’ouvertures qui forme le fond de scène, et pour tout mobilier des chaises en plastique blanc pour en renforcer l’absence de personnalité. Un lieu neutre, sans âme. Sur un porte-manteau, des blouses blanches nous conduisent droit à l’hôpital. Six femmes entrent. Elles sont les soignantes. Elles préparent la séance à venir dans un climat d’insécurité. Leur activité est menacée de suppression. Elles sont psychodramatistes, elles utilisent le psychodrame pour soigner leurs patientes. Elles se répartissent les rôles. L’une d’entre elles sera la meneuse de jeu.

Phot. © Jean-Louis Fernandez

Phot. © Jean-Louis Fernandez

Le psychodrame, une méthode thérapeutique

L’objectif est d’amener un patient ou une patiente à se libérer des monstres qu’il-elle abrite et à exprimer ce que ses blocages lui interdisent de dire, en utilisant le biais du jeu. La meneuse du jeu propose au patient ou à la patiente d’inventer une situation dont les psychodramatistes présentes assumeront les rôles. Personnages, animaux ou objets de décor, qu’importe la nature des personnages. Et la patiente de la pièce concoctée par Lisa Guez et ses « acolytes » peut choisir d’être elle-même un personnage ou de se faire seulement l'autrice et la metteuse en scène. Cette situation, elles l’ont élaborée dans une écriture collective dont le spectacle est issu, à partir de rencontres avec des femmes psychanalystes ou psychiatres qui pratiquent le psychodrame dans des centres psychiatriques. Elle s’inscrit dans le droit fil de la précédente création qui rassemblait les mêmes actrices et protagonistes : les Femmes de Barbe bleue. Dans cette pièce, les fantômes des femmes assassinées racontaient leurs histoires en rejouant, pour s’en libérer, les scènes d’affrontement avec Barbe bleue et les traumatismes créés par leur histoire. C’est dans la continuité de cette démarche que s’inscrit Psychodrame.

Phot. © Clara Normand

Phot. © Clara Normand

Entre psychodrame et théâtre, il y a la catharsis.

La démarche qui guide le psychodrame, qui utilise la transposition sur d’autres objets de traumatismes enfouis pour les faire venir au jour, est catharsis, « purification » de celui ou celle qui souffre de sa souffrance en la faisant accéder à la conscience. Et la purgation des passions de la catharsis a guidé toute une part de l’histoire du théâtre et des conceptions du jeu de l’acteur.

Ce que mentionnaient les thérapeutes interrogées, c’est l’impact que la pratique du psychodrame avait dans leur propre vie, au-delà de son intervention dans la psyché de leurs patients. Comme si révéler les autres à eux-mêmes avait pour corollaire de se révéler à soi-même. Une passerelle, une incidence, un retentissement qui s’inscrit dans la démarche de ces drôles de dames qui s’impliquent dans la compréhension et l’invention de leurs personnages en les regardant avec leur point de vue de femmes d’aujourd’hui.

Phot. © Jean-Louis Fernandez

Phot. © Jean-Louis Fernandez

Dedans-dehors, le rôle de l’improvisation

Elles vont choisir l’improvisation, à partir de situations évoquées au cours des entretiens ou puisées dans leur expérience propre, pour exprimer les zones d’ombre tapies dans les consciences féminines. Les comédiennes – quatre sur les six qui sont sur scène – joueront alternativement thérapeutes et patientes. Mutantes, et à rythme soutenu, elles incarneront celles qui souffrent et celles qui soignent, dans un déroulé qui verra finalement les rôles se flouter et la réversibilité s’installer. Avec un brio aussi remarquable que plein d’entrain, elles passeront de jeune « racaille » enceinte ou de femme-serpent à thérapeute distinguée quand elles ne joueront pas le papier peint habité ou la thérapeute au bord de la crise de nerfs.

Et tandis que leur monde se défait, que le service public est remis en cause, que la souffrance au travail s’intensifie, que la question du futur prend des teintes très sombres, elles seront résistantes, soignantes et soignées à la recherche d’une utopie que le théâtre rend possible. Une vision savoureuse, revigorante et pleine d’humour où la solidarité n’est pas un vain mot et le rêve d’un monde meilleur de l’autre côté des portes de la salle de soins.

Phot. © Jean-Louis Fernandez

Phot. © Jean-Louis Fernandez

Psychodrame (Texte édité à la Librairie Théâtrale, coll. l’Œil du Prince)
S Conception et mise en scène Lisa Guez S Une écriture collective de Fernanda Barth, Valentine Bellone, Sarah Doukhan, Anne Knosp, Valentine Krasnochok, Nelly Latour, Clara Normand et Jordane Soudre, dirigée par Lisa Guez S Avec Fernanda Barth, Valentine Bellone, Anne Knosp, Valentine Krasnochok, Nelly Latour et Jordane Soudre S Collaboration à la mise en scène et à la dramaturgie Sarah Doukhan S Création lumières et scénographie Lila Meynard S Réalisation du décor Ateliers de construction du ThéâtredelaCité sous la direction de Michaël Labat S Création sonore et musicale Louis-Marie Hippolyte (Louma Hipp) S Conseil scientifique à la création Géraldine Rougevin-Baville S Collaboration artistique et production Clara Normand S Regard chorégraphique Cyril Viallon S Remerciements Dušica S Production Compagnie 13/31 S Coproduction Comédie de Béthune - Centre Dramatique National Hauts-de-France, ThéâtredelaCité - Centre Dramatique National de Toulouse Occitanie, Bain Public à Saint-Nazaire, le Quai des rêves - Scène de territoire pour le théâtre de la Ville de Lamballe-Armor... S Soutiens Les Tréteaux de France - Centre Dramatique National (résidence), Bain Public à Saint-Nazaire (résidences) S Avec le soutien de la Région Bretagne, du Ministère de la culture - DRAC de Bretagne et du Département des Côtes d'Armor. La compagnie 13/31 est conventionnée par le Ministère de la culture-DRAC de Bretagne Durée 2h15 À partir de 15 ans

TOURNÉE
Du 8 au 12 octobre 2024 - Comédie de Béthune - CDN des Hauts-de-France
Les 14 et 15 novembre 2024 - Théâtre de Suresnes Jean Vilar, à 20h30
Du 26 au 30 novembre 2024 - ThéâtredelaCité - CDN Toulouse Occitanie, 26-29 à 20h, 30 à 18h
Du 3 au 12 décembre 2024 - Théâtre de la Ville, Les Abbesses, Paris, à 20h, sf le 8 déc.

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