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Arts-chipels.fr

Bruno Liljefors. Une immersion au cœur de la nature sauvage en Suède.

Sur l’affiche : Bruno Liljefors, Lièvre variable, 1905. Huile sur toile, 86 × 115 cm. The Thiel Galery, Stockholm. © Courtesy Thielska Galleriet, Stockholm / Photo Tord Lund.

Sur l’affiche : Bruno Liljefors, Lièvre variable, 1905. Huile sur toile, 86 × 115 cm. The Thiel Galery, Stockholm. © Courtesy Thielska Galleriet, Stockholm / Photo Tord Lund.

Le Musée du Petit Palais présente une exposition consacrée à Bruno Liljefors. Troisième volet du trio ABC – après Anders Zorn et Carl Larsson – de peintres suédois figuratifs actifs dans le dernier quart du XIXe siècle et au début du XXe, la centaine d’œuvres rassemblées pour l’exposition offre l’occasion de découvrir un artiste pour qui le spectacle de la nature est d’abord symbiose avec elle.

Aujourd’hui méconnu, Bruno Liljefors fut célébré en son temps comme « prince des animaliers ». Il faut dire que ses représentations d’animaux dans la nature sont saisissantes de vie, à la fois dans la méticulosité fantastique avec laquelle chaque brin d’herbe, chaque akène de pissenlit, chaque poil du pelage des renards ou des lièvres qu’il affectionne de saisir sont croqués. Un réalisme qui confine au surréel. Une précision qui touche à la maniaquerie et serait seulement fascinante par sa technique si elle ne disait, à travers la peinture, autre chose, de l’ordre de la relation à la nature et à la vie.

Bruno Liljefors, Renards, 1886. Huile sur toile, 71,5 × 91,8 cm. Gothenburg Museum of Art, Gothenburg. © Gothenburg Museum of Art.

Bruno Liljefors, Renards, 1886. Huile sur toile, 71,5 × 91,8 cm. Gothenburg Museum of Art, Gothenburg. © Gothenburg Museum of Art.

Entre romantisme et symbolisme

Le courant symboliste qui traverse le travail de nombreux artistes scandinaves dans les années 1890 imprègne également l’œuvre de Liljefors. Il s’associe chez lui à la force du sentiment de la nature hérité du romantisme. Le peintre se plaît en effet à représenter ces paysages si caractéristiques des pays nordiques dans les lumières dorées de soleil couchant, qui nimbent le paysage durant les longues soirées d’été, apportant avec elles une suspension du temps.

Ce sentiment de la nature se double d’une volonté de représenter cette même nature dans son frémissement et sa vie, fondant l’une dans l’autre la faune et la flore. Jamais la notion de « milieu » n’a été aussi présente et prégnante. Apportant à l’environnement naturel et aux animaux, qu’il saisit à l’affût en les observant avec une immobilité parfaite en même temps que par la photographie, avec une attention minutieuse, l’artiste pénètre au cœur d’un monde où plantes et animaux se fondent les uns dans les autres, formant un même microcosme, et où démêler l’un de l’autre reviendrait à séparer l’inséparable. Ce sont ces lièvres au pelage blanc d’hiver qui émergent de l’immensité blanche de la neige ou ces familles de renards dont le pelage roux se distingue à peine des feuilles mortes dans lesquelles ils reposent, ou encore ces hiboux à peine visibles sous le couvert des arbres.

Il ne fait toutefois pas l’économie d’une certaine cruauté des règles de survie de ce petit monde. Dans le jardin luxuriant de la nature, les renards dépècent les oiseaux, tout comme les chats, et les aigles des mers se saisissent en plein vol des poissons qui passent à leur portée.

Bruno Liljefors Cinq études d’animaux dans un cadre : Chat et pinson, 1885. Huile sur panneau, 35 × 26,5 cm. Nationalmuseum, Stockholm. © Stockholm, Nationalmuseum / Photo Cecilia Heisser.

Bruno Liljefors Cinq études d’animaux dans un cadre : Chat et pinson, 1885. Huile sur panneau, 35 × 26,5 cm. Nationalmuseum, Stockholm. © Stockholm, Nationalmuseum / Photo Cecilia Heisser.

Un artiste profondément nordique mais pas que

L’exposition présente, comme il se doit, quelques informations biographiques concernant l’artiste. Le peintre grandit à Uppsala, au nord de Stockholm, dans une zone entourée de vastes étendues sauvages. Inscrit à l’Académie royale de Stockholm, en même temps qu’Anders Zorn dont il restera l’ami toute sa vie, il conteste rapidement l’enseignement qui lui est dispensé, se forme auprès du peintre animalier Friedrich Deiker avant de gagner la Bavière, l’Italie et la France où il séjourne à Grez-sur-Loing, au sud-est de Paris, où s’est implantée une colonie nordique d’artistes. Les leçons du plein air de l’école de Barbizon, des impressionnistes et des naturalistes comme Jules Bastien-Lepage laissent une trace durable dans son œuvre, bien qu’il ait rapidement regagné la Suède et se soit consacré à la représentation de la nature locale…

Bruno Liljefors, Paysage d’hiver aux bouvreuils pivoine, 1891. Huile sur toile, 40 × 50 cm. Collection privée.

Bruno Liljefors, Paysage d’hiver aux bouvreuils pivoine, 1891. Huile sur toile, 40 × 50 cm. Collection privée.

Le parcours de l’exposition

L’exposition suit un parcours chrono-thématique qui s’étend sur la première moitié de la carrière de l’artiste, période où il affine son regard et individualise sa personnalité d’artiste. Elle abordera tour à tour les premiers voyages de Liljefors, ses dispositifs d’observation, ses photographies, et son processus créatif ainsi que les thèmes explorés – observation de la vie animale, parades amoureuses, chasse – les milieux auxquels l’artiste se consacre, dont la mer, ou les dioramas qu’il réalise, associant description naturaliste, animaux empaillés et peintures.

Une place à part est réservée au soin particulier que met l’artiste dans la mise en scène de ses représentations picturales, qui rappellent, quoique l’artiste s’en défende, l’art japonais. Ce sont de grands tableaux formés de petites scènes, agencées les unes avec les autres dans des cadres dorés, qui proposent un montage où la distribution des petites toiles est déjà une œuvre en soi. Le caractère doré des encadrements qui les hébergent marque la préciosité que l’artiste accorde à ces fragments et au principe du montage. Liljefors fait dialoguer les détails entre eux, alternant les formes géométriques dans lesquels ils apparaissent, jouant sur les formats originaux parfois verticaux ou au contraire très allongés, portraiturant ici une tête d’animal, là un échantillon de nature.

Quant au spectateur, il éprouve une certaine fascination à contempler ce spectacle naturel au-delà duquel transpire une vision du monde où l’homme brille par son absence.

Bruno Liljefors, Brise du matin, 1901. Huile sur toile, 128 × 276 cm. The Thiel Galery, Stockholm. © Courtesy Thielska Galleriet, Stockholm / Photo Tord Lund

Bruno Liljefors, Brise du matin, 1901. Huile sur toile, 128 × 276 cm. The Thiel Galery, Stockholm. © Courtesy Thielska Galleriet, Stockholm / Photo Tord Lund

Bruno Liljefors - La Suède sauvage
S Commissariat général Annick Lemoine, conservatrice générale, directrice du Petit Palais S En collaboration avec Anne-Charlotte Cathelineau, conservatrice en chef au Petit Palais. S Commissariat scientifique Sandra Buratti-Hasan, conservatrice du patrimoine au musée des Beaux-arts de Bordeaux, Carl-Johan Olsson, Carl-Johan Olsson, conservateur des peintures XIXe au Nationalmuseum de Stockholm.

Petit Palais - Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris. Avenue Winston-Churchill, 75008 Paris.
Tel : 01 53 43 40 00 www.petitpalais.paris.fr
1er octobre 2024 – 16 février 2025, mar.-dim. 10h-18h. Nocturnes ven. & sam. jusqu'à 20h.

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