10 Juillet 2024
Pour sa 26eme édition, Bar-le Duc a choisi de mettre en avant le collectif, le vivre ensemble et la création participative. Eric Aubry, directeur du festival et directeur de la culture de Bar le Duc a souhaité faire évoluer la formule en lui apportant cette nouvelle dimension qui se concrétise par une direction artistique un peu différente et des nouveautés mettant en scène ces principes. Le choix des intervenants de tous niveaux a été minutieusement étudié pour correspondre à ces critères de partage et de collaboration.
Le « FESTIVAL RENAISSANCES » comme son nom l’indique était à l’origine un festival tourné sur le patrimoine et les lieux historiques qui font la richesse architecturale de Bar-le-Duc. Mêlant théâtre de rue, cirque, danse et musique, le festival est devenu un évènement majeur de la ville, du département de la Meuse et de la région Lorraine. Désormais, avec ce nouveau regard artistique, cette édition allie tradition et modernité. Les choix programmatiques ont donc pour vocation de briser les entre-soi, de créer de l’émotion et de faciliter le partage et l’échange par la culture. Car Eric Aubry a choisi ce parti pris très fort de mettre la culture avec toutes ses composantes au service du vivre ensemble et du faire société. Un bien grand challenge par les temps qui courent. Mais l’engagement au profit des autres et du monde est parfois plus simple qu’il n’y parait et surtout beaucoup plus riche et porteur.
Ce partage et ce vivre ensemble est décliné tout le long du festival, en commençant par la création d’une table gigantesque de 300 convives qui a été réalisée par « Rue de la Casse », place Exelmans, et permet à tout un chacun de venir s’assoir pour manger et boire bien sûr mais aussi discuter et échanger avec son ou ses voisins, voisines. Elle trône au milieu de cette grande place en arc de cercle et donne comme une envie de festoyer aux participants. Rue de la Casse est une compagnie qui oriente ses recherches sur le rapport existant entre l’Humain et la Matière, ses créations prennent le plus souvent la forme d’œuvres lumineuses, mécaniques et sonores à destination de la population d’un territoire comme par exemple "L'Arbre Suspendu" et "Les étoiles s'envolèrent vers le ciel" pour les Fêtes de la Saint-Nicolas de Nancy.
Ci-dessous, quelques autres propositions artistiques que j’ai pu appréciées car je n’ai pas pu voir l’intégralité de la programmation car certains spectacles se chevauchent et que le principe est aussi de déambuler et de se laisser happer par les évènements au fur et à mesure de la ballade.
Une autre innovation programmatique toujours axée vers le collectif et le vivre ensemble, est la construction participative « Morphosis » dans le parc de l’hôtel de ville par la Cie Moso. Morphosis est une construction en bambou, différente à chaque fois car adaptée aux lieux et aux publics et qui offre la possibilité d’escalader ou simplement de regarder et parfois même de construire.
Anatole Zembok et Christine Pierre fondateurs de la compagnie, travaillent pour créer des architectures vivantes. Ils ont été séduits par l’efficacité du bambou qui réunit performances mécaniques, esthétisme, et vertus environnementales et depuis, ils explorent, à travers ce matériau, différents systèmes structurels. Depuis 2010, ils créent des spectacles, des installations diverses ainsi que des constructions de structures évolutives en bambous. Leur travail se situe entre les arts vivants, l’artisanat et l’architecture. La Cie MOSO fondée en 2011 à Strasbourg emménage en 2019 en Occitanie mais reste très attachée à la région Grand Est.
Un autre très beau moment de partage se découvre au détour d’une rue.
Ainsi la « BOUM », création de la compagnie ussé inné, invite tout un chacun à danser sur une playlist entrainante. Les danseuses et le danseur de la compagnie invitent très gentiment les passants et passantes à rejoindre le groupe qui grossit petit à petit. Les membres de la troupe savent y faire, ils dansent et tout en dansant invitent les spectateurs à les rejoindre, c’est si simple, très ludique et tellement réjouissant.
Depuis 2015, ussé inné utilise la danse pour questionner la place du corps dans l’espace public. Le collectif investit tous types d’espaces non-dédiés pour en révéler les spécificités, en détourner les usages et y impulser une nouvelle énergie. Le public est convié ainsi à devenir acteur, à reconsidérer son corps dans l’espace et avec les autres. La création, la danse et la playlists sont de Alice Bachy, Emilien Brin, Nora Couderc, Naomi Gross.
Encore un bel exemple de création au service du collectif, du partage et du vivre ensemble.
Dans un autre domaine, Moon, qui se veut « Cabinet de curiosités lunaires »
nous offre un spectacle imaginé sous la forme d’une exposition vivante et acrobatique.
À l’instar d’un cabinet de curiosité, Moon est une suite de surprenants dispositifs « antigravitaires » comme le décrit son créateur. Sur ou avec ces dispositifs tous plus ou moins farfelus et hétéroclites, les acrobates exécutent des contorsions et des enchainements d’une dizaine de minutes. Entre inventions fantasques et acrobaties impossibles, c’est une recherche de variations autour de la pesanteur. Les acrobates évoluent seuls ou à deux sur les dispositifs. Ils montent, tournent, s’élèvent, redescendent. C’est aérien, très poétique et captivant.
h o m, chorégraphie pour une sculpture à assembler.
h o m pour « Heart of the Matter » est un spectacle à la croisée de la danse, des arts visuels et des arts du cirque. Le point de départ est de créer un dialogue chorégraphique et sculptural autour des notions d’équilibre et de construction avec un dispositif scénique proche de la danse. h o m s’apparente à un mobile, ou plus spécifiquement à un stabile du fait que le point central d’équilibre part du sol.
Au début de la performance l’espace est jonché d’objets divers en bois et métal. Dans une sorte de danse de construction, le danseur-manipulateur construit petit à petit sa structure. Au fur et à mesure de l’assemblage, chaque élément est interconnecté aux autres tout en restant toujours à la limite de l’effondrement. C’est donc un jeu autour de la gravité, de l’équilibre des choses et des interactions. Mais aussi c’est une belle leçon autour de la fragilité soutenue par le collectif. Un élément seul ne peut pas tenir il lui faut un autre en face pour équilibrer. Et cette dualité entre équilibre et vibration, entre stabilité et chute est un bel exemple de ce parti pris par la nouvelle direction artistique.
Et pour finir la grande nouveauté de cette édition est la transformation à partir de 20h de la place des Minimes en salle de concert à ciel ouvert avec une programmation menée en partenariat avec La Cité Musicale de Metz qui fera la part belle aux artistes émergents de la région.
Bar-le-Duc, surnommée la « Belle Endormie », est située dans le département de la Meuse, en région Grand Est,dans la région historique et culturelle de Lorraine. On en retrouve des traces jusqu à l'Antiquité où elle était un relais le long de la voie romaine reliant Reims à Metz. Capitale du comté puis du duché de Bar, Bar-le-Duc devient l'une des principales citadelles lorraines, se développant à la fois au fond de la vallée, le long des berges de l'Ornain, et sur le plateau du versant gauche, autour du château du Moyen Âge. Après son rapprochement avec le duché de Lorraine à la fin du XVe siècle, elle connaît une période culturelle et architecturale prospère durant toute la Renaissance. Elle est finalement rattachée au royaume de France en 1766.
Ensuite, Bar-le-Duc n'a pas autant bénéficié de la révolution industrielle que les autres communes lorraines. Deuxième ville du département après Verdun au regard de la population, elle ne cesse de voir diminuer son nombre d'habitants depuis les années 1980. Depuis plusieurs années, la commune a donc choisi de développer son tourisme grâce au riche patrimoine hérité de son histoire. Elle est la seule « Ville d'art et d'histoire » de Lorraine avec Metz, plusieurs édifices sont répertoriés aux monuments historiques, et le secteur sauvegardé de la Ville Haute possède un remarquable quartier de style Renaissance.
Cette édition a donné une nouvelle direction à ce festival. Eric Aubry a voulu le tourner vers le vivre ensemble, le partage, la co-construction, en fait tout ce qui fait société et permet d’envisager l’avenir ensemble sereinement.
On souhaite donc une très longue vie et une belle réussite à cet évènement qui mérite le détour tout comme cette région verdoyante et paisible.
« FESTIVAL RENAISSANCES » à Bar-le-Duc tous les 1er week end de Juillet.