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Arts-chipels.fr

Le Birgit Kabarett. Le cabaret politique, c’est pas d’tout r’pos !

© Christophe Raynaud de Lage

© Christophe Raynaud de Lage

Haut les cœurs et hardi petits ! On a bien besoin de rire un peu en ce moment, surtout des sujets qui fâchent !

Le Birgit Ensemble a fait du cabaret politique sa spécialité. C’est d’autant plus difficile à l’heure actuelle que chacun gouverne à vue depuis la dissolution surprise de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron, que les alliances et retournements de veste sont devenus légion et que tout le monde pressent des résultats calamiteux pour les (très) prochaines législatives. Un troisième larron qui n’était pas prévu au programme du spectacle mais auquel les « Birgit », à ne pas confondre avec la « Brigitte » que l’on sait, ont fait une place au banquet des bons mots et des attitudes tordues qui caractérisent les politiques. Et même si le cœur penche à gauche, chacun en prend pour son grade…

Une formule qui a fait ses preuves

Créée dans la saison 2021-2022, la formule des Birgit Kabaretts est reconduite chaque année en collant à l’actualité politique et en intégrant les événements, déclarations et évolutions politiques apparus au cours de l’année. Forme musicale, assortie chaque année de cinq à sept chansons nouvelles, elle suit, d’édition en édition, le même cours : une première partie consacrée à la politique européenne et une deuxième dédiée à notre bonne vieille République, un peu beaucoup chahutée. Avec un petit quiz à la fin, histoire de tester les connaissance des spectateurs en bons mots et déclarations diverses. L’équipe se structure chaque fois de la même façon : deux maîtresses de cérémonie qui introduisent thèmes et personnages ; quatre comédiennes-chanteuses qui, par la magie d’une perruque, d’une paire de lunettes ou d’un complet-veston se métamorphosent dans les personnalités du moment, la mèche au vent, la mise impérieuse, les bourdes et éléments révélateurs aux lèvres, l’accent en prime. Deux musiciens très jazzy complètement la fine équipe. Faut qu’ça swingue, bien fort !

© Christophe Raynaud de Lage

© Christophe Raynaud de Lage

Une course contre la montre

Les maîtresses de jeu le rappellent au début du spectacle. La compagnie travaille en rush permanent. Pour être au plus près de l’actualité la plus brûlante, il faut écrire vite. La forme cabaret impose qu’on commence par les songs. En moins de quatre semaines, les paroles et les musiques des chansons sont écrites. Les interprètes ont deux semaines pour les apprendre. S’ajoutent les saynètes qui viennent s’intercaler entre les morceaux, puis trois jours de répétitions pour tout mettre en place et roulez fillette ! Autant dire qu’il est heureux que les participantes et participants soient rôdés et qu’ils aiment l’urgence dans laquelle baigne la création.

Aussi, lorsque la dissolution pointe son museau, c’est un peu la cata, parce que ça met le bazar dans un processus bien huilé. Parce que la version 4 nécessite des modifications immédiates pour faire face au cataclysme politique qui s’est abattu et que cette version 5 ne survivra que peu de mois, le temps que la version 6, qui intègrera les résultats des élections et les mesures prises par le nouveau gouvernement soit prête. L’hiver prochain, à l’occasion des fêtes de fin d’année. Le travail sur le fil, déjà périlleux dans son calendrier normal, se fait à grande hauteur et sans filet, mais avec bonheur. Le Birgit Ensemble a en plus pour lui un public déjà acquis et réceptif au contenu du spectacle.

Une cuvée 23-24 dans la tourmente

La cuvée 5 verra donc Ursula von der Leyer sombrer dans la déprime d’avoir escorté Georgia Meloni à Lampedusa tandis que défilent, rapportés par les maîtresses du jeu, les extraits de presse apocalyptiques et que les petits camarades de jeu d’Ursula font ceux qui ne voient rien. Pendant ce temps, Jordan Bardella et Gabriel Attal s’affrontent à coup de nombre de followers tiktok et de jeunisme et Olivier Véran coule des jours heureux dans la médecine esthétique tandis qu’on décerne la palme du retournement de veste à Éric Ciotti. Si la « divine » Rachida est bien sûr de la partie avec ses formules à l’emporte-pièce et son aplomb invraisemblable, elle fait la paire avec Anne Hidalgo dans un duo savoureux. Quant à Amélie Oudéa-Castéra, elle a oublié qu’elle était passée de l’Éducation nationale aux Sports…

À gauche aussi rien ne va plus. Entre un Raphaël Glucksmann, ancien sarkozyste qui se hausse du col et se félicite de son virage « gaucher » qui va à l’inverse de ce qu’on pratique quand on vieillit, qui fait rimer « Gaza » avec « Naturalia » et « Ukrainiens » avec « mocassins », et Ruffin, Olivier Faure et les autres, en plus d’un Mélenchon qui ne veut pas décrocher du wagon de tête, on [n’] est [pas] à la fête. Du coup, les JO sont presque soft, même si on plaisante sur la baignade dans une Seine « propre » reportée sine die et même si les cocoricos ne s’élèvent pas par amour du sport mais pour redorer à coups de médailles – d’or, bien sûr – un blason plus que défraîchi.

© Christophe Raynaud de Lage

© Christophe Raynaud de Lage

Une histoire au petit pied, mais infiniment révélatrice

Si l’on est plus proche dans ce spectacle des news du Canard enchaîné que de l’analyse historique pure et dure, ce qui ressort de cet enfilage de perles assez glauques dont on rit beaucoup, c’est en grande partie ce que véhiculent, toutes tendances confondues, les médias d’aujourd’hui, dans la coulée d’un monde de tweets hyperconnecté qui fait et défait les réputations en un clic et d’où toute vergogne politique semble être bannie. C’est ce mensonge généralisé doublé d’un cynisme ahurissant que le Kabarett met en évidence. Et même s’il roule résolument à gauche et appelle de ses vœux une réussite du Front populaire, c’est quand même pas la joie. Mais « tu verras, tu verras, on recommencera, tu verras, tu verras, jusqu’à la fin du monde. » En attendant, on compte les points et on montre du doigt les tricheurs. On peut se demander si ça fait du bien, en tout cas ça ne fait pas de mal d’ouvrir par le rire aux larmes des voies d’eau dans les navires d’assaut de l’extrême-droite.

Un spectacle adaptable selon les lieux © Christophe Raynaud de Lage

Un spectacle adaptable selon les lieux © Christophe Raynaud de Lage

Le Birgit Kabarett

S Conception, écriture et mise en scène Julie Bertin et Jade Herbulot / Le Birgit Ensemble S Composition et arrangements Grégoire Letouvet S Paroles Romain Maron S Comédiennes et chanteuses (en alternance) Eléonore Arnaud, Pauline Deshons, Anna Fournier, Morgane Nairaud, Marie Sambourg S Maîtresses de cérémonie Julie Bertin, Jade Herbulot S Musiciens Grégoire Letouvet (piano) et Alexandre Perrot (contrebasse) S Régie générale et lumière Victor Veyron S Régie son Julien Ménard en alternance avec Cédric Giscos S Administration, production Manon Cardineau, Colin Pitrat, diffusion Florence Bourgeon – Les Indépendances S Production Le Birgit Ensemble S Coproduction Théâtre de Châtillon S Résidences Théâtre de Châtillon (opus 1, 2, 3), Théâtre Gérard Philipe - CDN de Saint-Denis (opus 4), Le Grand R scène nationale La Roche-sur-Yon (opus 5), Théâtre au Fil de l'Eau, Pantin (opus 6) S Avec le soutien de la Région Ile-de-France, du Conseil départemental du Val-de-Marne au titre de l’aide exceptionnelle à la résidence de création, du Centre National de la Musique, et de la SPEDIDAM. S Le Birgit Kabarett a été créé le 18 novembre 2021 dans le cadre de l’association du Birgit Ensemble au projet du Théâtre de Châtillon La compagnie S Le Birgit Ensemble est conventionné par la DRAC Ile-de-France et par le Conseil départemental du Val-de-Marne S Julie Bertin et Jade Herbulot sont artistes associées au Grand R, scène nationale de La Roche-sur-Yon S Durée estimée 1h50 S À partir de 14 ans

Du 19 au 23 juin 2024, Théâtre du Rond-Point, Paris (75)

Tournée 2024-2025 (Le Birgit Kabarett #6)
5 et 6 décembre 2024, Théâtre au Fil de l'Eau, Pantin (93)
17 et 18 décembre 2024, L'Azimut, Chatenay-Malabry (92)
en option 20 et 21 décembre 2024, Le Volcan, Le Havre (76)
8 au 19 janvier 2025, Théâtre Gérard Philipe – CDN de Saint-Denis (93)
23 & 24 janvier 2025, Théâtre de Châtillon (92)

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