22 Juin 2024
La Muse en circuit poursuit ses investigations sonores nées des voisinages et chevauchements entre réalité immédiate et fictions artistiques, bruits, musiques, théâtre et voix, enregistrements du monde et pensée philosophique à travers le cycle NEWS, déclinable en fonction des lieux, du moment et de la durée choisie pour la performance.
La Muse en circuit, Centre National de Création Musicale, aime confronter la création musicale aux autres arts dans lesquels le son a sa part et à l’esprit des lieux dans lesquels le Centre s’installe pour engendrer chaque fois une création musicale qui entretient avec eux une relation particulière. Après avoir investi, entre autres, le lac Daumesnil dans le bois de Vincennes, entraînant le public à la frontière entre réalisme et fantastique au cours d’une balade en barque, dans les méandres de l’histoire de Peer Gynt, le Centre s’aventure sur la voie thématique des « News » en un cycle déclinable et chaque fois renouvelé selon les lieux où le spectacle est présenté et en fonction de la durée choisie.
Un principe de création original
Quelques règles de base guident chaque fois la performance, qui mêle éléments créés in situ et composants déjà enregistrés par ailleurs, mixés en direct au fil de l’événement. La déambulation en est un principe, avec ce qu’elle suppose de mobilité, physique autant que mentale. Une promenade éclatée et hybride où l’invitation à écouter entre en résonance avec le lieu. Un parcours collectif qu’on effectue solitairement, du fait du port du casque qui isole du monde extérieur, dans la quiétude de son propre cerveau devenu lieu d’écoute. Le collectif, c’est ce qu’on partage dans ses oreilles, une même échappée belle qui nous emporte et la vie qui continue son cours au milieu des croisements de micro-événements qui ponctuent le parcours sonore.
La coexistence entre fabrication pré-enregistrée et éléments produits en direct forme une structure à la fois invariante et sans cesse renouvelée par les « accidents » qui se présentent. Interviennent en effet en direct un conteur-narrateur, fil rouge de la promenade qu’il guide et emmène avec lui, qui commente son environnement en même temps qu’il poursuit la route fixée par le spectacle, les voix d’interprètes lyriques qui émaillent le parcours d’interventions chantées et la musique, interprétée en direct sur les instruments les plus divers, parfois insolites.
D’autres éléments appartenant au registre du langage – interventions journalistiques, extraits de texte, interviews… – enrichis d’une composition en direct de musique électronique intégrant un traitement des bruits du réel viennent s’insérer dans le parcours sonore imaginé par les concepteurs. Un dispositif technique spécialement adapté a été mis au point pour offrir une excellente qualité sonore tout en permettant la transportabilité de la performance en tous lieux et l'adaptation immédiate aux spécificités, tant matérielles qu'intellectuelles, de l'environnement.
Ainsi, en permanence, réalité questionnée et remodelée par la création et fiction du réel s’articulent en rendant les frontières poreuses et en introduisant un mouvement dialectique qui forme à chaque représentation une image, sonore comme il se doit, dont la polyphonie des voix et leur répartition dans l’espace sont des composantes indissociables.
Des News à figure éclatée et à géométrie variable
Les « nouvelles » proposées par le nouveau cycle produit par la Muse en circuit s’appuient, comme leur nom l’indique, sur l’actualité, mais présentée et présente sous différents angles. On y trouve ainsi aussi bien les bruits produits par l’environnement, un crissement de pas ou une course, qu’une réflexion sur ce que recouvre le concept d’information, de la mise en forme du monde au bruit qui en émerge, du rapport de la forme à la matière ou du processus qui fait de la lecture du journal, selon Hegel, une prière pour l’homme moderne. Invité vocal de chaque représentation, le philosophe Frédéric Worms tire derrière lui le fil de la réflexion.
S’y mêlent ces autres bruits du monde que sont la poésie et on entendra selon les parcours, un poème de la poétesse Sylvia Plath au destin tragique ou un corpus de textes italiens (Boccace, Calvino, Erri de Luca), comme dans Spoil match, la déambulation théâtrale présentée à Asnières-sur-Seine. Quant aux chants, ils se référeront à l’Italie dans le même spectacle ou iront puiser, pour Buzz, dans le fonds populaire français avec Nuits de Chine, un air de 1922 repris en duo a capella par Jean Gabin et Jean-Paul Belmondo dans Un singe en hiver ou le célébrissime L’amour est un oiseau rebelle chanté par Carmen dans l’opéra éponyme de Bizet.
Palais Royal oblige…
Au jeu des jeux, Buzz : de la bouche à l’oreille joue avec le lieu. La représentation se déroule dans les jardins du Palais-Royal, lieu historique de parole et de liberté. Le jardin se trouve sous les fenêtres du ministère de la Culture, qui vient justement d’amputer les activités culturelles de plus de 200 millions d’euros. L’information est bien là, et avec elle une autre actualité, celle des Jeux Olympiques, qui vient percuter la culture au travers d’une plongée dans la mythologie.
Parmi les disciplines olympiques, la course occupe une place de choix et le spectacle évoque une figure féminine qui excella à cet exercice : Atalante. Celle-ci incarne, d’une certaine manière, une figure de femme libre. Fille mal aimée d’un roi béotien qui souhaitait un garçon, elle est abandonnée par ses parents et, sous la protection d’Artémis, est nourrie par une ourse. Chasseresse, elle développe une très grande aptitude à la course et, devant les propositions nombreuses de mariage qu’elle reçoit alors qu’elle s’est juré de rester vierge, déclare qu’elle épousera seulement l’homme capable de la battre à la course. Les perdants seront tués. Pour tromper la jeune fille, Aphrodite, qui protège l’un des « candidats », Hippomène, laisse tomber trois pommes d’or du jardin des Hespérides. Atalante, curieuse, se laisse distancer. Les sources antiques diffèrent ensuite sur les raisons qui provoquent le sort tragique des époux et ce qu’il en advient. Il suffit d’ajouter à la fable une course improvisée le long de l’allée de tilleuls pour que les différents niveaux se mélangent et forment un tout indissociable dans lequel les « frottements », une fois de plus, sont à l’œuvre.
On l’aura compris, l’objet est riche et complexe, les formes mouvantes, les niveaux de lecture nombreux. Mais tout aussi important est le plaisir qu’on éprouve à cette promenade en zigzag mais au ballet impeccablement réglé. Et ce plaisir-là, on le partage avec les autres auditeurs qui s’échangent des regards complices.
Du cycle NEWS ont déjà été représentés :
Le 21 juin 2024 | Buzz : de la bouche à l’oreille. 8 représentations de 30 minutes dans les jardins du Palais-Royal, de 14h à 16h puis de 18h à 20h.
Le 19 juin 2024 | Spoil Match. De 19h à 20h. Une déambulation théâtrale d’une heure avec casque audio. Square Joffre à Asnières-sur-Seine. Dans le cadre des Olympiades culturelles.
Le 19 mai 2024 | Spoil. Au Festival Au Fil de l’eau à Saint-Nazaire
NEWS / … Spoil, Spoil Match, Buzz, Hoax, etc.
S Performance hyperlocale et mobile en immersion sonore sous casque avec polyphonie de voix et électronique S Direction artistique Abby Patrix & Wilfried Wendling Protagonistes S Angèle Chemin & Valérie Philippin (voix sopranes), Linda Edsjö (percussions), Grégory Joubert (musique électronique), Abbi Patrix (conteur) et d’autres artistes invités S Ingénieur du son Camille Lézer S Régie casque Laure Lang S Production déléguée La Muse en circuit – CNCM S Durée variable S Tous publics (dès 8 ans) S https ://alamuse.com