Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Arts-chipels.fr

Requiem(s) - une réflexion philosophique sur la vie et la mort – cérémonie(s)

Requiem(s) - une réflexion philosophique sur la vie et la mort – cérémonie(s)

Cela commence par une naissance, pour un spectacle appelé requiem(s) c’est un peu paradoxal mais le ton est donné. Clair-obscur, dualité et alternance seront les points forts tout le long du spectacle. Ce premier tableau est magnifique, très graphique, épuré à la limite de l’évanescence. Angelin Preljocaj nous fait traverser des mondes parallèles, nous invite à des cérémonies expiatoires et commémoratives parfois même jubilatoires dans un défilement de tableaux et de scènes incroyablement expertes et virtuoses. Alors même que le titre du spectacle nous inciterait au recueillement, c’est plus le ravissement et la fascination qui nous accompagnent.

Les scènes s’enchainent à un rythme effréné, toutes plus créatives les unes que les autres. Angelin Preljocaj sait jouer avec les corps de ses interprètes jusqu’au bout de leur possibilité physique tout en dégageant une aisance et une sensualité qui leur donnent au final une incroyable légèreté comme s’ils défiaient la « gravité », sic.

Requiem(s) - une réflexion philosophique sur la vie et la mort – cérémonie(s)

Le yin et le yang et l’alternance sont les piliers du spectacle

La philosophie du yin et du yang, je ne vous l’apprends pas, établit un équilibre entre la lumière et l’obscurité, le bien et le mal, le positif et le négatif d’une manière générale.  Ainsi, la chorégraphie joue beaucoup avec la dualité et l’alternance et évoque irrémédiablement ces concepts ancestraux. Cela se concrétise parfois avec les danseurs en ligne qui évoluent de manière inversée,  parfois avec des groupes, toute la troupe ou un ou deux duos. Le Yin et le yang transparaît donc dans tous les éléments de la chorégraphie, d’abord avec le noir et le blanc présents tout le long. Puis les changements de rythme parfois lent et sensuel et parfois trépidant avec l’alternance des extraits musicaux tels que W.A.Mozart et System of a Down, J-S.Bach, et G.Deleuze par exemple.
Angelin Preljocaj recherche cette dualité ultime parfaitement maitrisée qui se joue dans le dialogue entre la vie et la mort et évoque les moments de joies que l’on éprouve en se remémorant la vie avec le défunt mais aussi ces moments de recueillement en nous invitant à des cérémonies improbables. C’est le paradoxe de ce spectacle c’est parfois très sombre et même violent et parfois si tendre et sensuel.

Requiem(s) - une réflexion philosophique sur la vie et la mort – cérémonie(s)

Les couleurs maitrisées le noir et blanc et un léger soupçon de rouge

Le travail graphique est savamment orchestré et participe complètement à la scénographie d’Adrien Chalgard aidé en cela par les lumières d’Éric Soyer et les vidéos de Nicolas Clauss.
Tout le long du spectacle le noir et le blanc sont déclinés à l’infini, soit par les effets d’ombre et de lumière, personnages en contre-jour et d’autres bien éclairé avec des costumes blancs soit avec des costumes noirs avec des effets blancs ou un décor blanc avec des ombres. Le rouge apparaît juste au milieu du spectacle pour quelques scènes et accentue cette impression de noir et blanc en étant le révélateur et la ponctuation de ces scènes particulières. C’est comme si le langage chorégraphique d’
Angelin Preljoca en s’épurant n’avait besoin que de l’ombre et la lumière pour être mis en valeur.

Un langage chorégraphique de plus en plus épuré et virtuose

Angelin Preljocaj maitrise si parfaitement les mouvements du corps de ses interprètes qu’il peut leur demander de se surpasser encore et encore. Il y a des portés incroyables où la danseuse est propulsée, presque désarticulée. Parfois on a l’impression qu’ils flottent au-dessus de la scène. Parfois les corps se tordent  et se ramassent si intensément qu’on a l’impression que les danseurs et danseuses ne sont pas comme nous qu’ils ont des os plus souples et des corps plus malléables.
Angelin Preljocaj joue également parfaitement avec le graphisme des corps en mouvement et en groupe. Ainsi dans Gravité, il nous avait réjoui avec une rosace magnifique sur le boléro de Ravel, ici une des scènes met le corps des danseurs et danseuses sur un autre plan avec un jeu graphique savamment épuré.

 

Requiem(s) - une réflexion philosophique sur la vie et la mort – cérémonie(s)

Des éléments qui s’articulent pour donner du sens au monde

Le spectacle raconte le monde. Ne cache pas la violence de notre monde mais il la restitue autrement. Pour Angelin Preljocaj, le langage du corps permet de dire les choses autrement.

La danse permet de dire des choses au-delà des mots, permet l’indicible pour dire autrement ou dire des choses que les mots ne disent pas. Les mouvements du corps révèlent, incarnent des expériences humaines sur un autre territoire. Danser, c’est raconter le monde avec ses émotions, c’est restituer le monde au travers de son corps, par son corps en allant chercher l’émotion plutôt que de la jouer. Danser, c’est chercher à donner du sens au monde par la sincérité et la justesse de ses émotions.

La danse est un écho du monde connectée à l’essentiel de nous-même et tout le talent du chorégraphe c’est de donner du sens et de savoir nous le raconter. La danse c’est le chemin de la résilience et sur ce chemin Angelin Preljocaj est loin devant.

Angelin Preljocaj a une biographie excessivement riche et abondante car au-delà de ses chorégraphies il fait de multiples créations et collabore avec des nombreux artistes. Ainsi il fait des études de danse classique avant de se tourner vers la danse contemporaine. Il travaille entre autres auprès de Merce Cunningham, Viola Farber et Quentin Rouillier. jusqu’à la création de sa propre compagnie en décembre 1984. Depuis Il a chorégraphié 60 pièces. Il s’associe régulièrement à d’autres artistes dans des domaines divers tels que la musique, les arts plastiques, le design, la mode, le dessin, la littérature ou le cinéma d’animation. Ses créations sont présentées dans le monde entier et reprises au répertoire de nombreuses compagnies, dont il reçoit également des commandes comme le New York City Ballet, la Scala de Milan, le Ballet de l’Opéra national de Paris…
Il a réalisé plusieurs courts-métrages et films mettant en scène ses chorégraphies. Son premier long-métrage, Polina, danser sa vie, réalisé avec Valérie Müller est sorti en salle en 2016. En avril 2019, il est nommé à l’Académie des Beaux-Arts dans la nouvelle section chorégraphie. Il crée une courte chorégraphie pour l’application Danse Europe !, projet participatif ouvert à tous en 2022 lors de la Présidence Française du Conseil de l’Europe.

Ses dernières créations sont Mythologies sur une musique pour orchestre de l’ex Daft Punk Thomas Bangalter, en 2022, et en 2023 Birthday Party pour des interprètes seniors au Théâtre National de Chaillot et Torpeur en juillet 2023 au Festival Montpellier Danse.

Angelin Preljocaj est un des plus talentueux chorégraphe actuel, et ce dernier spectacle réunit la dextérité et la performance jusqu’à la virtuosité associées à la sensualité et la délicatesse pour notre plus grand plaisir. Magistral !

Distribution :

Chorégraphie : Angelin Preljocaj
Musiques : G.Ligeti, W.A.Mozart, System of a Down, J-S.Bach, H.Guðnadóttir, G.Deleuze, Chants médiévaux (anonymes), O.Messiaen, G.F Haas, J.Jóhannsson, 79D

Lumières : Éric Soyer
Costumes : Eleonora Peronetti
Scénographie : Adrien Chalgard
Vidéo : Nicolas Clauss
Assistant, adjoint à la direction artistique : Youri Aharon Van den Bosch
Assistante répétitrice : Cécile Médour
Choréologue : Dany Lévêque
Avec : Lucile Boulay, Elliot Bussinet, Araceli Caro Regalon, Leonardo Cremaschi, Lucia Deville, Isabel García López, Mar Gómez Ballester, Paul-David Gonto, Béatrice La Fata, Tommaso Marchignoli, Théa Martin, Víctor Martínez Cáliz, Ygraine Miller-Zahnke, Max Pelillo, Agathe Peluso, Romain Renaud, Mireia Reyes Valenciano, Redi Shtylla, Micol Taiana
Direction technique : Luc Corazza
Régie générale / son : Martin Lecarme, Mathieu Viallon
Régie lumières : Anaïs Silmar
Régie vidéo : Fabrice Duhamel
Régie plateau : Juliette Corazza, Jérémie Blanchard
Costumière : Tania Heidelberger
Photographe : Yang Wang

A la Villette, dans le cadre des spectacles Chaillot nomades, du 23 mai au 6 juin 2024.

Tournées 2024-2025

Montpellier 04→06 juillet Le Corum
Vichy 12 juillet Opera de Vichy
Perpignan 04→05 octobre L'Archipel
Ste Maxime 12 octobre Le Carre
Aix-en-Provence 16→19 octobre Grand Theatre de Provence
La Rochelle 19→20 novembre La Coursive
Cannes 30 novembre Palais des Festivals
Modene (Italie) 04 decembre Teatro Comunale Pavarotti-Freni
Caen 18→22 decembre Theatre de Caen
Sceaux 06→09 fevrier Les Gemeaux
Versailles 12→19 mars Opera Royal du Chateau
Rouen 02→04 avril Opera de Rouen
Athenes (Grece) 13→14 avril Megaron Concert Hall

Dijon 13 mai Auditorium
Fribourg (Suisse) 16→17 mai Equilibre

Vaison-la-Romaine juillet Vaison Danse

 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article