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Arts-chipels.fr

Come Bach. Quatre filles trempent leurs pieds dans le ruisseau d’un Jean-Sébastien Bach déjanté.

Come Bach. Quatre filles trempent leurs pieds dans le ruisseau d’un Jean-Sébastien Bach déjanté.

Elles ont sauté à pieds joints et plus car affinités dans la musique de Jean-Sébastien Bach qui, contrairement à son nom, n’est pas ruisseau mais grande rivière. Ses multiples prolongements forment un delta musical de première grandeur que le spectacle explore.

Elles sont quatre femmes qui s’amusent des développements à toutes les sauces de ce génie inégalé de la musique. On a subi au fil du temps la Truite de Schubert ou les Quatre saisons de Vivaldi, jusqu’à l’écœurement, dans les cabinets médicaux et au téléphone, c'est au tour de Jean-Sébastien de se trouver sur la sellette des messages téléphoniques d’attente ou d’aiguillage qui ouvrent le spectacle. Mais cette partie émergée de l’iceberg, polluée par l’atmosphère, est là pour dire que le vrai goût est ailleurs, dans le florilège des œuvres que ces dames nous offrent de ce musicien à quatre lettres dont chacune est note de musique, la dernière représentant le si naturel médiéval, devenu si bécarre dans la notation moderne.

Bach dans ses multiples ramures

Bach n’a jamais quitté l’Allemagne mais ses œuvres ont fait le tour du monde et inspiré sans relâche nombre d’autres musiciens à travers les siècles. Si l’aventure commence avec Mozart et Beethoven, elle n’en fait pas moins le miel des musiciens contemporains, de Camille Saint-Saëns à Arvo Pärt ou à Nino Rota, sans compter les jazzmen et les chanteurs de variétés qui se sont emparés de ses motifs inoubliables et de l’impeccable mécanique inventive de ce Maître pour l’éternité des temps. De cette diversité, les quatre dames de Come Bach ont fait spectacle, pour notre plus grand bonheur.

© Alexis Rauber

© Alexis Rauber

Cinq dames que la curiosité aiguillonne

Elles ont du chien et de l’allant, les cinq interprètes – deux d’entre elles sont en alternance – qui se présentent sur scène. Chaque soir, ce sont trois instrumentistes et une chanteuse, bardées de prix et de qualifications, qui font le show. Elles ont en commun d’aimer sortir des sentiers battus, d’explorer d’autres voies que celles de la formation classique qu’elles ont reçue. Anne Baquet, chanteuse formée à Saint-Pétersbourg, s’illustre aussi bien dans la création contemporaine, le théâtre musical que les concerts baroques et passe avec aisance du registre populaire, un peu canaille, à la musique savante. Au piano, Claude Collet, musicienne éclectique qui a accompagné la chanteuse Anne Sylvestre, compose et alterne chant et instrument. À la contrebasse, Amandine Dehant, membre de l’Orchestre de l’Opéra de Paris, privilégie le travail scénique de l’instrumentiste tout en explorant une large palette d’effets instrumentaux. Au hautbois et cor anglais, Anne Régnier et Ariane Bacquet ne sont pas en reste. La première, soliste de l’Opéra de Paris depuis 1996 et chambriste, s’intéresse au travail scénique. La seconde, qui explore les répertoires contemporains, affectionne les projets atypiques qui débordent les cadres traditionnels du concert. 

© Alexis Rauber

© Alexis Rauber

Des interprètes survoltées

C’est avec beaucoup d’humour que, dans la tenue noire de rigueur des concerts « classiques », elles prennent possession de la scène. Rien ne les freine dans la manière dont elles s’emparent de la musique et de la scène. Elles se livrent à un véritable ballet dont la cocasserie a sa part, chantant a capella en rang d’oignon face au public, se livrant à une séance de gymnastique en mesure ou transformant le piano en piédestal pour un solo de hautbois ou son siège en accessoire de théâtre. Avec un art consommé, elles créent un parcours qui va s’intensifiant et s’accélérant comme une machine qui s’emballe pour terminer sur un clin d’œil à leur précédent spectacle et son ABCd’airs. Alternant parties instrumentales et chantées, mélangeant les genres, en paroles et musique, elles sautent d’un style à l’autre, d’une époque à l’autre, d’un air à l’autre avec une aisance ludique et malicieuse.

© Alexis Rauber

© Alexis Rauber

Bach à tous les étages

La diversité même des emprunts à Jean-Sébastien Bach explorée par le spectacle séduit. Au-delà des adaptations pour les instruments intégrés au spectacle, parfois relayées par le chant qui remplace l’instrument, on découvre les échappées belles qu’a inspirées aux musiciens les plus divers le Kantor de Leipzig. Des variations mozartiennes aux valses « sous le nom de Bach » composées par Nino Rota pour Casanova de Fellini ou au Collage sur B-A-C-H d’Arvo Pärt qui reprend la notation musicale si bémol, la, do, si naturel associée au nom du compositeur qu’il transpose dans une musique sérielle, on traverse l’échelle du temps. On surfe sur le Bach’n Jazz avec Just in Time, composé pour une comédie musicale de 1956, Bells are ringing, qui mettait en scène une standardiste new-yorkaise indiscrète ou avec le contestataire If I Had a Hammer, coécrite par Pete Seeger et Lee Hays, dont Claude François fera un tube vidé de toute dimension subversive, Si j’avais un marteau, dont nos dames s’amusent. Côté variété, on passe par Maxime Leforestier, François Morel ou Marie-Paule Belle.

En bref, il y a bon-boire et bon-manger dans le pique-nique humoristique et musical proposé par cette compagnie du Renard pleine de malice, et on s’assoit volontiers à la table.

© Alexis Rauber

© Alexis Rauber

Come Bach

S Mise en scène Gérard Rauber S Avec Anne Baquet (voix), Claude Collet (piano), Amandine Dehant (contrebasse), Anne Régnier (hautbois et cor anglais) en alternance avec Ariane Bacquet Photos Michel Nguyen S Production Le Renard S Coréalisation Théâtre Lucernaire Partenaire Pianos Hanlet S Remerciements Marie-Paule Belle, Philippe Decamp, Bernard Joyet, Isabelle Mayereu, François Morel, Damien Nedonchelle, Michel Nguyen, Gabriel Phillipot, Jean-Philippe Viret, pour leur présence S Programme Bach Forever (Damien Nédonchelle, d’après le concerto en mi majeur de J.S. Bach), Just in time (Betty Comden, Adolph Green - Jule Styne, J.S Bach – arrgt: Leonard Bernstein), Badinerie (J.S. Bach), La petite fugue (Maxime Leforestier), Menuet 1 de la 3e suite pour violoncelle (J.S. Bach), Bacchanales (Saint-Saëns), Ma plus courte Chanson (François Morel – J.S. Bach, Damien Nédonchelle), Musette (Anna-Magdalena Bach), Contre, tout contre, Bach (Jean-Philippe Viret), 12345 (Isabelle Mayereau - Marie Paule Belle), Ça rame (Philippe Decamp – J.S. Bach, François Rauber), Adagio (J.S. Bach, Marcello), Eine Kanone (domaine public), Toccata en ré mineur (J.S. Bach), B-A-C-H (Arvo Pärt), Si j’avais un marteau (Hays Lee, Peter Seeger adapt. Buggy Vline – J.S. Bach), Circus Waltz (Nino Rota), D’abord ton Bach (Bernard Joyet – J.S. Bach), Menuet 2 de la 3e suite pour violoncelle (J.S. Bach), Toccatina (Nicolaï Kapoustin), Piano Bartok (Philippe Decamp -Claude Collet), Zapping alphabétique (Arrangement Gabriel Phillipot) S Durée 1h15

Du 13 novembre 2024 au 12 janvier 2025, du mardi au samedi 20h, dimanche 17h, le 24/12 à 17h

Lucernaire – 53 rue Notre-Dame-des-Champs, 75006 Paris

Rés. 01 45 44 57 34 et www.lucernaire.fr

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