23 Février 2023
Du 3 au 26 mars, le Lavoir Moderne Parisien en partenariat avec Rwanda Arts Initiative, convoque, dans le théâtre et à la Goutte d’Or, la scène contemporaine rwandaise dans toutes ses formes artistiques. Devoir de mémoire oblige : le génocide des Tutsi y occupe, bien évidemment, une place non négligeable.
Au cœur de la Goutte d’Or, le Lavoir Moderne Parisien initie en 2022 les Hyper-rencontres Africapitales. Théâtre, danse contemporaine, concerts, projections, expositions, lectures, rencontres-débats, labos créatifs, et plus encore... entrent en connexion pendant un mois pour mettre en synergie les dynamiques diasporiques et transculturelles. Après une première édition « Bamako à Paris », c’est au tour de « Kigali à Paris » d’explorer et d’exposer la scène contemporaine rwandaise.
Les présentations des organisateurs
Dorcy Rugamba Directeur artistique de Rwanda Arts Initiative - LA BAIE DE GLAISE
L’imaginaire rwandais utilise la symbolique de l’excavation pour se figurer le travail des artistes dont la ressource - l’inspiration - porte le même nom que la carrière et la baie de glaise d’où le forgeron et le potier extraient leur matière première : « Inganzo ». […] Depuis longtemps au Rwanda, on reconnaît un artiste à sa capacité à creuser. À la profondeur qu’il atteint dans le traitement d’un sujet pour dévoiler ce qui n’apparaît pas à la surface ou pour faire advenir ce qui n’existe pas encore. Depuis la fondation de la principauté des poètes au XIIIe siècle - Intebe y’abasizi - par la poétesse Nyirarumaga, considérée comme la mère des lettres rwandaise, une longue chaîne unit entre eux les artistes rwandais, qui d’une génération à l’autre se sont donné pour sacerdoce de s’emparer des sujets du moment et de conserver le legs des anciens. […] Aujourd’hui que le monde est devenu un village, il n’y a plus une parcelle, une réalité matérielle ou métaphysique qui échappe au regard et au traitement de la scène artistique rwandaise, spécialement celle de Kigali, hub polyglotte, ville monde et cosmopolite, férue de nouvelles technologies, connectée à toutes les villes du monde par les canaux du numérique.
[…] Cette programmation des Africapitales « Kigali à Paris » est construite sur deux axes.
La scène contemporaine de Kigali s’empare du présent avec une force de proposition qui ne se contente pas de rêver de l’avenir, mais de l’inventer.
Khalid Tamer Directeur de la compagnie Graines de Soleil - LES HYPER RENCONTRES AFRICAPITALES
[…] L’Afrique, les diasporas et les afrodescendants deviennent le pivot autour duquel non seulement les relations entre le monde et le continent se redéfinissent et se renégocient, mais aussi au sein duquel notre futur, durable et solidaire, s’invente. Cette réalité géopolitique est aussi démographique et anthropologique. Le jeune continent foisonne de la créativité d’une jeunesse malmenée autant que d’opportunités d’innovations plurisectorielles.
Dans les rues de la Goutte d’Or comme dans celles de Kigali, les jeunes revendiquent leur voix et leur place dans le monde et dans la construction de celui-ci. Bâtissons les moyens de leur rencontre, de leur puissance et de leur confiance. Faisons de nos villes et de nos quartiers les foyers de la mise en réseau de nos sociétés civiles, les noyaux de nos sociabilités nouvelles, de la transformation de nos regards, de la redéfinition de notre présent et de nos futurs possibles. L’art et la culture sont au cœur de ces mutations. […]
Le programme
- de la DANSE avec L'Autre et moi de Wesley Ruzibiza et Isabelle Cheveau au Lavoir Moderne Parisien, le 5 mars à 17h. Prix spécial du Jury Bordeaux Métropole 2017. Une courte forme chorégraphique tout public proposée par Lab’elle, compagnie Isabelle Cheveau. La découverte sensitive et physique du corps, des corps. Avec une confiance et une innocence primaires, le féminin et le masculin se rencontrent, se découvrent, tissent entre eux des liens charnels. Ils agissent et réagissent l’un par rapport à l’autre, s’attirent, s’individualisent, se confondent, jusqu’à ne faire plus qu’un.
- du THÉÂTRE avec Devil's Gold de Jules César Niyonkuru le 12 mars à 17h au Lavoir Moderne Parisien. Une pièce sur le passage à l’âge adulte et l’altruisme. Après le décès de son père, Idriss, pour nourrir sa famille, travaille dans la mine de souffre où il rencontre Mel, une jeune scientifique venue étudier les flammes bleues du Volcan. Les deux amis réaliseront leur impuissance face à la grande aventure qu’est la vie et devront s’adapter et user de malice pour pouvoir braver le système. - We call it Love d'Ishyo Arts Centre le 24 mars à 20h au au Lavoir Moderne Parisien. Un huis clos entre une femme et l’assassin de son fils, questionnant les concepts de justice, de pardon et de réconciliation. Ce récit poétique et fort s’inspire de l’histoire vraie d’une femme qui, au lendemain du génocide, s’est retrouvée totalement seule avec ce trop-plein d’amour qu’elle avait pour les siens et qui a décidé de le donner à celui qu’elle pensait en avoir le plus besoin : le meurtrier de son fils. - Méandres de Natacha Muzira Makenga au Lavoir Moderne Parisien le 25 mars à 20h. Une expérience immersive interactive mobilisant plusieurs médias. Le spectacle explore le mal-être inexprimé et inexprimable de deux protagonistes qui tentent au cours de leur voyage et par tous les moyens dont la danse, de se libérer du poids de leurs témoignages trop longtemps tus.
- de la MUSIQUE avec Kigali Acoustic Night : Samuel Kamanzi, Tania Rugamba et Weya Viatora-Makembe à FGO-Barbara le 11 mars à 17h, et Makembé au Lavoir Moderne Parisien le 26 mars à 18h
- du STAND-UP avec Pardonnez-nous vos offenses d'Hervé Kimenyi le 16 mars à 20h, au Lavoir Moderne Parisien. L’humoriste rwandais nous emmène dans une spirale d’anecdotes et de réflexions aussi osées les unes que les autres, décrivant l’époque que nous traversons, une satire qui vise à montrer du doigt la dérive médiatique sociale et culturelle que notre époque traverse et qui finit sur une note bienveillante. - Did you just say sex ? de Michael Sengazi à la Scène Barbès le 19 mars à 19h30. Un voyage dans le temps passé présent et futur, à travers les expériences du comédien Michael Sengazi, sur les relations hommes et femmes. Un savant mélange de l’actualité, différentes cultures et pratiques culturelles de plusieurs pays.
- du THÉÂTRE JEUNE PUBLIC avec Tout dépend du nombre de vaches de Dalila Boitaud-Mazaudier, rue d'Oran les 18 & 19 mars à 11h et 15h. Un travail de mémoire raconté à des enfants pour que les innocents assassinés au Rwanda ne disparaissent pas de l’Histoire. Parce que l’enseignement des génocides du vingtième siècle n’est pas obligatoire et que les professeurs sont laissés seuls responsables d’en parler ou non. Tout comme les familles, tout comme chacun d’entre nous.
- du CINÉMA avec Le Silence des mots de Michael Sztanke et Gaël Faye, débat le 4 mars à 14h30 à la Bibliothèque de la Goutte d’Or. Un documentaire et les témoignages de femmes sur les violences commises par les soldats français de l’opération Turquoise pendant le génocide. - Father's day de Kivu Ruhorahoza à la Bibliothèque Goutte d'or et au Lavoir Moderne Parisien
- un DÉFILÉ DE MODE d'Elodie Fromenteau et Abdoul Mujymbere, rue d'Oran. Le 11 mars à 15h. Elodie Fromenteau a grandi en France à Toulouse et s’envole vers Londres à 20 ans, puis décide de rentrer au pays pour renouer avec ses racines. Elle se lance en 2021 dans la Mercedes Benz fashion week à Kigali. Sa nouvelle collection, « Ndabaga », nom d’une des grandes et vaillantes guerrières rwandaises qui sera présentée pour la première fois à Paris, s’inspire entièrement du Rwanda, avec des estampes typiques rwandaises qui n’ont pas encore été exploitées dans le pays. Abdoul Mujyambere est un créateur de mode émergent basé et travaillant à Kigali, au Rwanda.Il pratique également le théâtre, la danse et les arts visuels. Abdul Majyambere fait ses débuts dans la mode en Novembre 2020. Sa première collection est inspirée de son identité de ses convictions et de ses valeurs en tant que jeune artiste africain rwandais contemporain. Cette collection a également été inspirée par la lutte pour l’indépendance de nos héros africains tels que Thomas Sankara, Lumumba, Frantz Fanon
- une BANDE DESSINÉE de Damien Roudeau et Thomas Zridi, exposée en avant-première à l'Echomusée Goutte d'Or. Débat le 10 mars à 19h30 à l’Echomusée. Alain et Dafroza Gauthier se battent depuis 20 ans pour que soient jugés les responsables du génocide perpétré contre les Tutsi du Rwanda en 1994. La bande dessinée «Le mal dont on ne guérit pas» (éd. Steinkis, 170 pages couleur, sept 2023) écrite par Thomas Zribi et dessinée par Damien Roudeau, se veut une caisse de résonance de ce combat.
- une EXPOSITION, Kiberinka, avec les artistes Alice Kayibanda Kayisire, Nyambo Masamara, Abdoul Mujyambere, Hakim, Zaina, du 3 au 26 mars au Lavoir Moderne Parisien. « Kiberinka » est un terme polysémique qui signifie littéralement en kinyarwanda, « la lumière qui sied aux bovins ». Notamment la lumière de fin de journée, naturelle et dorée, où le bétail rentre des pâturages. Au Rwanda « kiberinka » peut décrire également une personne, une situation, un état, une période ou un instantané particulièrement gracieux. Ces cinq artistes aux univers contrastés partagent entre eux l’appartenance à la génération montante des artistes visuels de Kigali et une même quête de grâce qui tire son inspiration de la vie et de l’imaginaire poétique rwandais.