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Arts-chipels.fr

Les Étoiles. Dans la nébuleuse incertaine qui sépare le rêve et la réalité.

© Simon Gosselin

© Simon Gosselin

Ce très beau spectacle aux allures de songe éveillé, où la cocasserie a sa part, conjugue la mort et la vie, le réel et l’imaginaire dans une évocation onirique pleine de tendresse.

Ezra est un poète. Sa force, c'est la parole. Il vit heureux dans sa drôle de famille, dans une drôle de cabane qui ressemble à une isba russe. Mais voici que sa mère meurt et que son univers bascule. C’est à lui, qui a les mots, que revient la charge de faire l’éloge funèbre de la défunte. Mais au moment de commencer son discours, le voici incapable d'aligner des sons organisés. Il a perdu ses mots. Sous la nuit étoilée, il les cherche auprès des personnages qui hantent les contes et la mythologie. Le présent devient poreux. Il laisse entrer une temporalité où présent, passé et avenir se mêlent, où le jeune homme retrouve l’enfant qu’il a été et l’adulte qu’il deviendra, où se projette sa mère enfant et où les histoires de chacun des personnages, elles aussi, passent dans les trouées de l’espace-temps.

© Simon Gosselin

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Des personnages hauts en couleurs

Toute une galerie de proches se presse autour d’Ezra. Il y a d’abord le Père, Pierre, le bricoleur plein d’esprit pratique pour qui la première préoccupation à la mort de sa femme est de planter autour du trou les fleurs rouges qu’elle aimait, et l’oncle Jean, le naïf, le candide un peu simplet – parce qu’il n’a pas les mots – un peintre et sculpteur qui peuple la maison de poteaux-créatures d’art brut aux multiples couleurs. Autour d’eux gravitent Sarah, amoureuse d’Ezra, qui le regarde s’éloigner dans son songe éveillé et cherche à le rattraper et la Responsable des funérailles qui finit par taper l’incruste comme diraient les ados. Sur tous règne Zocha, la mère, figure tutélaire, toujours la clope à la bouche même quand on l’évoque enfant.

© Simon Gosselin

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… et leurs métamorphoses

Mais voici que les nuits se peuplent de blancs fantômes à la mesure du monde imaginaire dans lequel s’est réfugié Ezra. Ce n’est pas tout à fait par hasard si Pierre devient le Roi des contes, si Zocha se mue en divinité toute-puissante au nom quasi imprononçable – Kowagunta-Papo – et si Monsieur Jean, déjà habité dans la réalité par un autre monde, se mue en Monsieur Dieu. Quant à Sarah, elle ne peut être que la Princesse des contes, dans un univers qui ne cesse de glisser d’un registre à l’autre, où Dionysos fait des apparitions, où veille un chien statufié, où les oiseaux marionnettes grandissent et où s’installent les animaux.

© Simon Gosselin

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Une vie qui s’écoule dans un rêve

On se laisse prendre dans cet univers multiforme où les panneaux qui forment l’isba s’ouvrent pour révéler l’intérieur de la maison, où l’espace se modifie au fil de cet étrange parcours entre éveil et sommeil, réel et imaginaire, qui métamorphose la Maison en radeau où se réfugient ces naufragés de l’amour. On glisse au fil des assonances qui surgissent dans le texte – mère-mer, père-pierre – dans un monde où les mots, eux aussi, deviennent impalpables, multiformes, où les rebours du temps qui mêlent passé et présent au temps qui passe peuvent prendre les chemins du cinéma, où les références artistiques attestent de la réalité de l’illusion. On se laisse entraîner dans l’étrange parcours de ce jeune homme qui traverse vingt-cinq années de sa vie comme un rêve. Parce que la poésie est là, intense, unique, et qu’on est dedans.

© Simon Gosselin

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Les Étoiles

S Texte et mise en scène Simon Falguières S Avec John Arnold (Pierre, Le roi de conte), Mathilde Charbonneaux (La responsable des funérailles, Dionysos, La reine de conte, Madame Leponcois), Charlie Fabert (Ezra), Simon Falguières, Pia Lagrange (Sarah, Macha, La princesse Anne), Stanislas Perrin (L’oncle Jean, Monsieur Dieu), Agnès Sourdillon (Zocha, Kowagountata Papo) et la participation d’Emma Lagrange S Scénographie Emmanuel Clolus S Lumières Léandre Gans S Création sonore Valentin Portron S Costumes Lucile Charvet assistée de Léa Bordin S Accessoires Alice Delarue S Assistanat à la mise en scène Édouard Eftimakis S Réalisation film Emmanuel Falguières S Régie générale Clémentine Bollée assistée de Nicolas Gérard S Dispositif sonore Celsian Langlois S Instrumentarium métallique Igor Boyer S Le texte Les Étoiles est lauréat de l’Aide à la création de textes dramatiques – Artcena/ ODIA. Il est publié aux éditions Actes Sud-Papiers S  Création à La Colline – Théâtre national en 2020 (représentations ouvertes seulement aux professionnels) S Production Le K S Coproduction avec La Colline – théâtre national, le Théâtre du Nord CDN – Lille-Tourcoing-Hauts de France, Le Tangram – scène nationale d’Evreux Louviers, le CDN de Normandie – Rouen, Le Trident – scène nationale de Cherbourg-en-Corentin, Le Préau – CDN de Normandie – Vire, DSN – Dieppe scène nationale S Avec le soutien du ministère de la Culture DGCA, de la DRAC Normandie, de la région Normandie, du département de l’Eure, de l’ODIA; avec la participation artistique du Jeune théâtre national; en coréalisation avec le Théâtre de la Tempête. S Le Théâtre de la Tempête est subventionné par le ministère de la Culture, la région Île-de-France et la ville de Paris S Durée 2h

Du 6 janv. au 5 fév. 2023, du mardi au samedi 20h, dimanche 16h

Théâtre de la Tempête, Cartoucherie – Route du Champ-de-Manœuvre 75012

Réservations www.la-tempete.fr T 01 43 28 36 36

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