À la vie à la mort. Vous r’prendrez bien une tranche de vieille amitié !

Y a-t-il quelque chose qui résiste à la traversée de la vie ? Ces retrouvailles de l’amitié ont le goût drôle et doux-amer du temps qui passe…

Trois amis de trente-cinq ans ou plus se retrouvent à l’enterrement d’un de leurs proches. Ce n’est ni le premier ni, vraisemblablement, le dernier auquel ils assistent ensemble. Mais ils sont amis et se doivent d’être là pour celui qui est en deuil. Ici, c’est au tour d’Hélène de pleurer et aux autres de la consoler. D’une drôle de façon, d’ailleurs. En parlant d’autres deuils, d’autres enterrements, d’autres morts. Et ce n’est pas le petit chat mais le chien qui est mort… Ils sautent du coq-à-l’âne, se font des déclarations d’amitié mutuelle, ravivent leurs souvenirs communs, versent un peu de vitriol sur certaines de leurs relations communes. Leurs parents sont morts, leurs enfants partis, ils sont devenus papy et mamie, et, la cinquantaine dépassée, ils ont maintenant leur vie derrière eux. Heureusement il leur reste l’amitié. À la vie à la mort ! 

Le cheminement d’une amitié

Au sortir de ce petit cimetière de campagne, quoi de plus naturel que d’aller tous ensemble boire un coup et manger un morceau et d’y aller à pied dans une balade à travers la campagne. Voilà nos trois oiseaux partis, caquetant, pépiant, bavardant sur un chemin champêtre. Deux hommes et une femme qui se connaissent depuis si longtemps qu’ils n’ont plus à se raconter d’histoires, à vouloir paraître ce qu’ils ne sont pas. Le cimetière sur l’écran en fond de scène cède peu la place à une allée rustique à travers bois et taillis tandis qu’ils dévident de manière décousue le fil de leurs vies. Ce chemin les mènera, de l’extérieur, vers l’intérieur d’une maison, comme leur parole les conduit des banalités convenues – ou à peu près – à un épluchage psychologique et à des autoanalyses réjouissantes.

Entre comédie et drame existentiel

Leurs dialogues révèlent gouffres et frustrations, entre tentatives gâchées, ambitions insatisfaites et histoires d’amours inabouties. L’un parle cul – pour se guérir de quoi ? – la deuxième de sa « réussite » d’avoir maîtrisé sa vie et goûté tous ses fruits. Le dernier, moins grande gueule, semble en retrait, sans doute parce qu’une partie de ses problèmes reste encore présente devant ses yeux. Ils sont cash, ils n’ont plus rien à se cacher au soir de leur vie. Pour conjurer l’échec qui se profile derrière chacune de leurs réflexions désabusées, de leur humour parfois à l’emporte-pièce qui ne dédaigne pas d’être grinçant, ils multiplient les embrassades, les serments d’amitié, peut-être parce qu’ils demeurent un moyen de conserver un sens à la vie, un rempart contre la désespérance.

Écrit pour les acteurs qui en sont les personnages et puisant sa matière dans un fonds où expérience vécue et imaginaire ont partie liée, cette exploration introspective et fictionnelle a des allures de tranche de vie teintée d’une atmosphère vaguement boulevardière, présentée brute de décoffrage, en ni mieux ni pire que la vie, et sans volonté de démontrer quoi que ce soit sinon de rire de cette inanité, qui est aussi la nôtre. Et comme les comédiens y barbottent à l’aise, ça passe plutôt pas mal.

À la vie à la mort

S Texte et mise en scène Gilles Gaston-Dreyfus S Avec Anne Benoît (Hélène), Stéphane De Groodt (Paul), Gilles Gaston-Dreyfus (Joseph), Amira Hadzic S Scénographie et collaboration à la mise en scène Pierre-François Limbosch S Assistante à la mise en scène Amira Hadzic S Lumières Fabrice Combier S Musique Nicolas Errèra S Sound design Jean Croc S Costumes Carine Sarfati S Images Fabrice Sebille, François Quillard et Marie Gascoin S Régie générale Anne Wagner Dit Reinhardt S Réalisation décor Tako Prod S Production Compagnie Barimer / Gigafus S Coproduction Anthéa Théâtre d’Antibes S Avec l’aide de l’ADAMI Déclencheur S Avec le soutien du Théâtre du Rond-Point — Paris S Remerciements Nicolas Boukhrief, Sophie Fillières, Camille Melvil, Sylvain Granjon, Gilles Kneusé, Eric Viellard, Freddy Viau, Jean-François Gabard Agence Zelig, Lucien Winocour S Création janvier 2023 à Anthéa / Antibes (06)

25 janvier – 12 février 2023, 21h (sf lundi), dimanche 15h

Théâtre du Rond-Point – 2 bis avenue Franklin D. Roosevelt, 75008 Paris

Rés. 01 44 95 98 21 www.theatredurondpoint.fr