24 Octobre 2024
Un soupçon d’insolence, un ton décalé et beaucoup d’humour caractérisent cette production québécoise du nouveau cirque. Des garçons y rient d’eux-mêmes et nous font rire tout en présentant d’authentiques et difficiles numéros d’acrobatie. Calisse de tabarnak !
Sur la scène, c’est tout un bric-à-brac qui encombre l’espace. Un vieux rideau rapiécé occupe le fond de scène, des quilles de jonglage sont montées sur la roue dentée d’un dérailleur de vélo, une selle est accrochée à un échafaudage, une planche traîne dans un coin. Un climat de récup’ bien dans l’air du temps, un apprêté aux allures « sauvages ». Le musicien qui apparaît sur scène ne le démentit pas. Doté d’une fourchette, il va s’atteler à un exercice de percussions avec les outils les plus divers dont une clé à molette dans une belle cacophonie que ses cinq compagnons s’attachent à faire cesser. Le ton est donné. C’est sur le mode burlesque que ces garçons « dans le vent » se définissent sur scène.
Acrobatie à tous les étages
Ils n’ont pas froid aux yeux, ces acrobates qui utilisent la planche coréenne pour s’élever de plus en plus haut dans des figures complexes, parfois en retournés, parfois en jouant sur le groupe ou le duo. Dans des figures au trapèze qui évacuent le traditionnel relais dans l’espace qui projette le trapéziste vers le porteur, l’acrobatie est privilégiée et le décor de tubulures de l’échafaudage mis à contribution pour un déplacement vertigineux dans l’espace qui fait fi de la verticalité. Mais les objets se dérobent, les cordes qui retiennent la barre du trapèze ont la bougeotte, elles montent et descendent tandis que le voltigeur, en position inconfortable, s’attache, justement, à les fixer. Flirtant avec la catastrophe, il s’en sort, évidemment, toujours…
Un vélocipède pas tel qu’en lui-même
Bientôt nos cinq compères se lancent dans un numéro de jonglage où alternent le solo, le duo et le collectif. Les quilles volent en tous sens, avec des lanceurs dans toutes les positions, couchés ou debout, en équilibre instable ou sans cesse en déplacement. Ils font un petit tour de jonglage puis se renvoient les quilles dans un ballet réglé au petit poil. Dans le décor à la Tinguely qui fait tourner sans raison des objets insolites, vestiges du monde circassien, le vélo est comme un leitmotiv. Il apparaît dans une série d’acrobaties où la vitesse, l’avant-arrière permanent, le monter-descendre en roulant, les rotations, les je-te-le-fais-sur-un-pied ou en-équilibre-sur-une-main ou monté-sur-le-guidon à une vitesse stupéfiante sont la règle.
Des bêtes de cirque très humaines et pleines d’humour
Ils jouent avec la disparition programmée des animaux sauvages sur la piste des cirques – la loi contre la maltraitance animale interdira complètement, à partir de 2028, leur présence dans les cirques en France –, en remplaçant eux-mêmes le lion ou le tigre que le dresseur fait passer au travers d’un cerceau. Avec malice, humour et virtuosité, ils multiplient les cerceaux, réduisant leur dimension, compliquant le passage par une élévation de plus en plus grande, mêlant un tour de magie à la prestation. Facétieux, ils sollicitent une spectatrice qu’ils entraînent dans un monde où les objets sont humains, et incitent à la participation du public.
Un art du clown passé au filtre des chippendales
Ils ont une manière de rire de soi qui entraîne l’adhésion du public, en particulier dans une époustouflante séquence où ils démarrent un striptease faisant valoir leurs torses musculeux et leurs allures de beau gosse pour se lancer ensuite dans une opération « j’enlève aussi le bas », cachés derrière des serviettes éponge avec lesquelles ils jonglent dans un savoureux et désopilant numéro de rattrapage de tissus qui se dérobent sans cesse. Pas besoin de nez rouge, de clown blanc et d’auguste pour se fendre la poire. La Machine de cirque, avec son mélange de technologie décalée, de bazar insolite, de disciplines circassiennes authentiques et de bonne humeur offre un moment de rire revigorant en même temps qu’une performance épatante.
Machine de cirque
S Idée originale, écriture du spectacle, direction artistique et mise en scène Vincent Dubé S Collaborateurs à l’écriture et à la mise en scène Yohann Trépanier, Raphaël Dubé, Maxim Laurin, Ugo Dario, Frédéric Lebrasseur S Avec Guillaume Larouche, Thibault Macé, Philippe Dupuis, Samuel Hollis, Laurent Racicot S Composition musicale et interprétation Frédéric Lebrasseur S Musicien Frédéric Lebrasseur ou Steve Hamel ou Olivier Forest (en alternance) S Conseillers artistiques Patrick Ouellet, Harold Rhéaume & Martin Genest S Conseillères à la scénographie Josée Bergeron-Proulx, Julie Lévesque et Amélie Trépanier S Costumes Sébastien Dionne S Éclairages Bruno Matte S Son René Talbot S Ingénieur mécanique David St-Onge S Direction technique Patrice Guertin S Production Machine de Cirque et Temal Productions S Soutiens Conseil des Arts et des Lettres du Québec Conseil des Arts du Canada L’entente de développement culturel intervenue entre le gouvernement et la ville de Québec Délégation générale du Québec à Paris S Durée 1h20
Du 12 novembre 2024 au 5 janvier 2025
La Scala Paris - 13, boulevard de Strasbourg, 75010 Paris
www.lascala-paris.com T. : 01 40 03 44 30