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Arts-chipels.fr

Marmaille. Un festival de créations pour marmots de tous âges, mais pas que…

Marmaille. Un festival de créations pour marmots de tous âges, mais pas que…

L’association Lillico, implantée à Rennes, dédie son action aux enfants de tous âges. Elle a, depuis 2021, le statut de Scène conventionnée d’intérêt national. Le résultat de trente années d’un travail exigeant et de qualité. Lillico organise le festival Marmaille, qui compte entre autres une quinzaine de créations et se donne pour objectifs l’art, l’éducation, l’épanouissement et l’imagination. Un bien beau programme !

Au point de départ, on trouve une association et des bénévoles qui ont souhaité créer un lieu de vie pour les enfants dès le plus jeune âge, pour les familles et pour l’ensemble des professionnels en lien avec l’enfance. Avec la volonté de défendre l’accès à un art de qualité pour tous, quelles que soient leurs origines, leur statut, leurs ambitions, leur milieu. Ce projet citoyen d’accession à la culture pour tous part de ceux qui formeront le tissu social de demain : le jeune public. Si la spécificité de Lillico réside dans le jeune public, elle recouvre une réalité multiple : les enfants forment une terre en perpétuel mouvement, organisée en strates et en expériences de vie très diversifiées. Leur âge, leur mode de vie et leur milieu sont pour l’association des composantes essentielles. Elles conditionnent non seulement le choix, la création et la présentation des spectacles qui leur sont destinés mais aussi les conditions d’accueil des spectacles.

© DR

© DR

Une implantation dans un quartier

Lillico est implantée dans un quartier périphérique de Rennes incluant une zone importante d’habitat social, avec les difficultés du quotidien, le manque de moyens et la précarité qui sont souvent associés à ces lieux. Depuis l’origine, sous l’impulsion de Christelle Hunot, sa directrice, qui est également plasticienne du textile, Lillico a envisagé son action en prenant en compte son implantation dans le quartier et avec sa population. Non seulement en programmant des spectacles ou des animations et en travaillant avec le milieu scolaire mais aussi en instaurant un véritable contact avec les habitants sous diverses formes. Il passe d’abord par la participation de nombreux bénévoles au fonctionnement des activités. Il s’effectue ensuite par le biais d’événements festifs auxquels tous les habitants du quartier sont conviés. Chacun y apporte qui un gâteau, qui un plat ou autre chose et y rencontre les voisins en même temps que les artistes. Mais c’est aussi par le choix d’éclater les spectacles hors les murs en investissant, par exemple, tout un immeuble pour y réaliser des performances. Faire venir la création là où sont les gens, aller à leur rencontre.

Touche © Michel Grasso

Touche © Michel Grasso

L’enfance ou plutôt les enfances

Lillico privilégie ce moment des âges de la vie où l’ouverture et l’apprentissage sont fondamentaux, où les terres encore vierges de l’expérience et de l’imaginaire sont à mettre en culture, où défricher permet aussi de déchiffrer le monde. Considérant l’enfance depuis le ventre maternel jusqu’à l’adolescence, l’association offre des spectacles pour tous les âges et pour des enfants accompagnés de leurs parents ou pas. Un moyen non seulement de tenir compte de tous les publics, mais aussi d’accompagner les enfants tout au long de leur parcours. Travaillant avec des psychologues, des psychanalystes et autres spécialistes de la petite enfance, les participants interrogent les idées toutes faites sur la jeunesse et son imaginaire, proposent des projets de création qui sont des explorations en terres parfois non convenues, avec toujours une même revendication d’exigence et de qualité.

Un lieu de recherche et d’exploration artistique

Jouant la proximité, l’association explore différentes voies. Avec des plasticiens et des artistes au travers de LaBo, où ils dialoguent avec des personnes ressources et les membres de l’association. Lieu d’expérimentation et de discussion installé dans le hall d’accueil de la salle Guy Ropartz, centre névralgique des activités de l’association, le LaBo offre un champ d’expérimentation qui trouve sa place dans les lieux de vie et sur les plateaux où sont créées des œuvres qui en sont issues. C’est le cas par exemple des Ventres de coton, de sons, de fils ou de lumière de Nina Gohier ou d’Écoutes sous ZABRIS de Christelle Hunot, une installation textile et sonore inspirée du sein et destinée aux tout-petits. L’organisation, en second lieu, de résidences d’artistes offrent aux enfants, aux équipes encadrantes et aux familles un contact direct et prolongé – de quelques mois – avec un créateur et leur permettent de pénétrer à l’intérieur même du processus de création. Des actions sont aussi menées au travers de la Chuchoterie sur l’univers du livre et de l’art, mais aussi en explorant des propositions scénographiques sur le mobilier ou les espaces de la petite enfance.

Touche © Michel Grasso

Touche © Michel Grasso

Trois temps forts chaque année

Le spectacle occupe évidemment une place privilégiée. Au travers des temps forts Petite enfance, les créations proposent aux tout-petits une expérience sensible et tactile qui passe par la musique, les vibrations, le mouvement, dans un univers organique, liée à la matière. Ainsi, dans Touche, après avoir assisté à la métamorphose d’un personnage qui sort de sa coquille textile pour explorer le monde en expérimentant au passage un vêtement fait de coquilles de noix qui se transforme en animal ou de curieuses coquilles dont les tortillons ne cessent de s’allonger et d’offrir un nouvel espace de jeu, escortés par un univers sonore qui accompagne l’évolution des formes et le mouvement, où le bruit et la musique sont traversés de phrases à peine compréhensibles qui disent la présence du langage en devenir, les enfants sont invités à prendre possession de la matière, à en éprouver le caractère doux ou rugueux, le côté fabriqué ou l’aspect brut, puis à l’utiliser pour une caresse ou un jet, une cachette ou un fil qu’on tire… L’autre axe exploré par Lillico – et qui rejoint le premier – est l’exploration du théâtre d’objets dans sa relation au théâtre et à la marionnette, avec en particulier le travail de Fanny Bouffort, qui explore les paysages d’objets à la croisée des arts plastiques et des textes théâtraux. Il se prolonge, au mois de mai, par un temps fort consacré au théâtre d’objets avec des spectacles en intérieur et en plein air. Tous les partenaires de l’association sont associés à sa programmation qui s’accompagne d’un moment festif et convivial.

A poils © Jean-Louis Fernandez

A poils © Jean-Louis Fernandez

Marmaille, in et hors les murs

Le Festival Marmaille synthétise, d’une certaine manière, l’action menée par Lillico. Durant dix jours, il propose des spectacles qui couvrent l’ensemble des classes d’âge du public jeunesse, avec leurs niveaux d’appréhension et de compréhension, mais pas seulement. Cette année, pas moins de 23 compagnies participent au festival ; 20 spectacles et 108 représentations sont organisés dans près d’une vingtaine de lieux : salles de spectacles dédiées au théâtre, de jauge importante, ou théâtres « de poche », salles de MJC, médiathèque, espaces culturels divers, espaces d’exposition transformés en lieux d’animations autour des arts par des plasticiens sont investis par le Festival dans Rennes ou aux environs. Ils créent un mouvement qui mobilise parents, enfants et enseignants. Le cinéma n’est pas en reste avec des courts et un moyen métrages d’animation. Et les livres artistiques de la Chuchoterie constituent une invitation à la rêverie et offrent un accès à l’imaginaire dans un décor-cocon de tapis douillets et de coussins étoilés.

Martial Anton et Daniel Calvo Funes (Tro-Heol) © DR

Martial Anton et Daniel Calvo Funes (Tro-Heol) © DR

Un banc d’essai et un espace d’échanges

Le festival Marmaille apparaît comme un point d’orgue des actions menées tout au long de l’année. Il offre à des compagnies le moyen de présenter un travail en cours d’élaboration. Il peut s’agir du projet en gestation d’une artiste en résidence comme avec Pascal(e) où les thèmes de la différence, du genre et de l’exil sont explorés au travers d’une fantasmagorie qui emprunte à la science-fiction. Cette comédie écolo-aquatique se déroule en 2050, alors que la montée des eaux liée au réchauffement climatique, a fait du Bassin parisien une zone inondée. Elle met en présence deux sœurs aux personnalités opposées – la première, businesswoman toujours accompagnée de son appli mobile qui s’est réfugiée en Suisse, l’autre, restée sur place et se déplaçant en kayak, qui récupère les déchets plastiques de notre société consumériste pour en faire bijoux et vêtements. Tombée à l’eau, cette dernière découvre une créature étrange, une sorte d’huître venue d’ailleurs, ni homme ni femme, dont elle tombe amoureuse… Ces projets de création, prévus à l’horizon 2022, sont parfois accompagnés d’une présentation des créations de l’année. C’est le cas pour la compagnie Tro-Heol qui présente, en même temps qu’un projet pour 2024, la création d’Everest, réalisé avec les étudiants en fin de cycle de l’École nationale supérieure des arts de la marionnette de Charleville-Mézières (voir nos articles déjà publiés en suivant les liens suivants : http://www.arts-chipels.fr/2021/06/fin-de-parcours-pour-les-etudiants-de-3e-annee-de-l-ecole-nationale-superieure-des-arts-de-la-marionnette.html et http://www.arts-chipels.fr/2021/06/everest.une-fable-initiatique-sur-les-apprentissages-de-l-existence-0.html). Les professionnels du spectacle et les programmateurs peuvent, durant le festival, découvrir les projets, rencontrer les artistes et échanger avec eux.

Vendredi © DR

Vendredi © DR

Des histoires sans paroles…

La communication avec les enfants peut être purement sensorielle, parcours de bruits, de formes et de mouvements comme pour Toiles, destiné aux tout-petits. Elle peut aussi, pour des enfants plus grands, s’apparenter à un propos théâtral en même temps que plastique, dans une forme dont on aurait transformé le texte en gestuelle, en visuel et en musique, comme dans Vendredi, de Christine Le Berre, destiné à un public de 8 ans et plus. Le spectacle présente, sous une forme muette qui emprunte – avec un inégal bonheur – à la danse et à l’expression corporelle, une version largement révisée de Robinson Crusoé. Sur une île déserte, Vendredi est devenu un personnage féminin. Elle est colonisée et réduite en esclavage par un Robinson, lui aussi devenu femme. Elle finira par se révolter, prendre à son tour le pouvoir avant de comprendre que c’est main dans la main qu’on fait avancer les choses et que le monde doit évoluer.

Rencontre avec Michel B. © Géraldine Le Tirant

Rencontre avec Michel B. © Géraldine Le Tirant

Variations autour du texte

Parfois les enfants sont conviés à participer au spectacle comme dans le savoureux À poils, accessible aux enfants dès cinq ans, où les enfants tirent de caisses qui bougent toutes seules et encombrent l’espace les coussins et autres poufs qu’ils devront placer dans l’espace au bon endroit. Ils leur permettront de s’asseoir à l’ombre d’un arbre pour le moins singulier, sous la conduite de trois rockers hirsutes à la pilosité de plus en plus envahissante, une « poilosphère » où se retrouvent enfants et adultes, petits et grands et où toutes les tailles fraternisent. Au fil du spectacle, les enfants sont sollicités pour apprendre de nouveaux mots, qu’ils doivent mémoriser et répéter en chœur. D’autres, plus âgés, jouent à se faire peur avec l’inénarrable ogre de la Rencontre avec Michel B. (à partir de 9 ans) qui répond au plaisir qu’éprouvent les enfants à connaître le petit frisson que procurent les monstres. Le spectacle manie avec un sens parfait du crescendo l’angoisse attendue et distille avec un humour ravageur le mélange de fascination et de répulsion, d’attirance et de peur qu’éprouvent les enfants face à cette figure sans laquelle les contes ne seraient plus les contes et le fantastique réduit à un merveilleux de pacotille mièvre et sucré. Les enfants, d’ailleurs, ne s’y trompent pas dans l’enthousiasme avec lequel ils accueillent le spectacle. Quant aux plus grands, ils ne peuvent que faire leur miel de l’histoire de ce pauvre ogre qu’on laisse crever de faim, tout seul dans sa cellule…

On dit pas j'ai crevé © Marine Prunier

On dit pas j'ai crevé © Marine Prunier

Des sujets qui n’évitent pas le « là où ça fait mal »

Le festival aborde aussi les sujets douloureux que les parents ont parfois du mal à traiter avec leurs enfants tel ce spectacle sur la mort à la fois drôle et poignant. Dans On ne dit pas j’ai crevé, destiné aux enfants à partir de 9 ans et présenté à des collégiens, Enora Boëlle met en scène une morte qui parle. Elle retourne le point de vue qu’on a habituellement sur la mort – celui des vivants, de ceux qui restent – en faisant décrire par la morte la manière dont elle perçoit les gens qui se pressent autour d’elle, dont elle voit les fausses tristesses et les vraies douleurs, le cérémonial dont elle est l’objet, le cycle de la vie qui s’achève. Avec délicatesse et humour, elle offre aux spectateurs un moyen d’apprivoiser cet événement autour duquel les parents, bien souvent, tournent en périphrases en recourant aux métaphores. En appelant un chat un chat, Enora Boëlle démystifie la mort et la rend plus cernable.

De ces quelques exemples glanés au fil du festival émerge la vie qui fourmille sous la surface du programme et l’enthousiasme qui anime les équipes organisatrices comme les créateurs. Car, au-delà d’une démarche plus qu’estimable, il est ici question de passion, d’engagement et d’innovation. Que demander de mieux ?

Festival Marmaille – Marmaille en fugue

S Direction Christelle Hunot S Administration Matthieu Baudet S Billetterie et comptabilité Maïwenn Bénech S Médiation et action culturelle Pascal Marzin S Chargée de développement de projet Alix Clerfeuille S Communication Géraldine Le Tirant S Direction technique Salle Guy Ropartz Thibaut Galmiche S Régie générale Salle Guy Ropartz et accueil des résidences Marmaille en Fugue Federico Climovich S Régie Festival Marmaille Lionel Meneust S L'association Lillico est subventionnée par la Ville de Rennes, Rennes Métropole, le Département d’Ille-et-Vilaine, la Région Bretagne, le Ministère de la Culture, DRAC Bretagne, le Ministère chargé de la Ville, la Caisse d’Allocations Familiales d’Ille-et-Vilaine. S Avec le soutien de la Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale de Bretagne et de l'ONDA. Elle est Scène conventionnée d'intérêt national en préfiguration. Art, Enfance, Jeunesse et dans le cadre du Plan de Relance 2021

Du 19 au 29 octobre 2021

www.lillicojeunepublic.fr

LES TOURNÉES

Rencontre avec Michel B.

18 & 19 novembre 2021 - Le Quai des Arts Argentan (61)

3 & 4 décembre - La Graineterie Houilles (78)

10 & 11 janvier 2022 - Le Strapontin Pont-Scorff (56)

Ven. 4 mars 2022 - Le Pôle Sud Chartres-de-Bretagne (35)

25 & 26 avril 2022 - Salle Jean Carmet Allonnes (72)

À poils

25 & 26 septembre - Festival mondial des théâtres de marionnettes – Charleville-Mézières (08)

5 & 6 octobre - Houdremont, centre culturel La Courneuve (93)

Du 14 au 16 octobre – Hors Saison – échappées culturelles en Erdre et Gesvres – Petit-Mars (44)

Du 19 au 20 octobre – Festival Lillico – RENNES (35)

29 octobre – Le Sémaphore – Port-de-Bouc (13)

25 novembre – Festival De Beaux Lendemains – Saint Brieuc (22)

Du 29 novembre au 4 décembre - Le Grand R – Scène nationale de La Roche-sur-Yon (85). Tournée décentralisée à Venansault (29-30 nov.), Aubigny-les-Clouzeaut (2-3-4 déc.)

Du 7 au 10 décembre - Centre culturel André Malraux – Vandœuvre-lès-Nancy (54)

15 & 16 déc. - Festival Sur un petit nuage, Centre culturel Simone Signoret – Canéjan (33)

Du 5 au 7 jan. 2022 - Le Manège – scène nationale de Maubeuge (59)

Du 10 au 16 jan. - Théâtre Antoine Vitez – scènes d’Ivry-sur-Seine (94)

30 jan.-3 fév. - Maison de la Musique de Nanterre (92)

Du 21 au 24 fév. - Scène nationale 61 – Flers (61)

27 fév. - Vélo Théâtre – Apt (84)

Du 8 au 10 mars - Festival La tête dans les nuages, Théâtre d’Angoulême, Scène nationale (16)

17 & 18 mars - Comédie de Béthune – CDN (62)

Du 2 au 8 avr. - TJP – CDN Strasbourg Grand Est (67)

Du 11 au 13 avr. - Scène nationale du Sud Aquitain – Bayonne (64)

Du 3 au 6 mai - Les 2 scènes – scène nationale de Besançon (25)

On ne dit pas j’ai crevé

Du 18 au 25 nov. 2021 - Théâtre Dunois Paris

10 déc. - Théâtre la Paillette Rennes (35)

Vendredi

Du 25 au 27 nov. - La Passerelle - Scène nationale de Saint Brieuc (22)

Du 27 au 29 janv. 2022 - Le Vivat - Armentières (59)

1er fev. - Le Dôme - Saint Avé (29) / Dans le cadre du festival Prom'nons nous

Robinsonne ou le mirage de Vendredi (1er volet de Vendredi)

14 & 15 oct. - Hors saison, les Echappées culturelles - Erdre & Gesvres (44)

27 oct. - Kastell d'ô - Uzel (22) / Dans le cadre du festival Mini-Mômes & Maxi-Mômes

2 & 3 fév. 2022 - Le Dôme - Saint Avé (29) / Dans le cadre du festival Prom'nons nous

Du 3 au 5 mai - Théâtre Le Passage - Fécamp (76), scène conventionnée d'intérêt national art et création

Touche

1er & 2 fév. 2022 - Erstein Saison culturelle dans le cadre de « MOMIX en balade » (67)

25 & 26 fév. - La Passerelle à Rixheim (68)

Juillet 2022 - Saison Estivale du Taps à Strasbourg (67)

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