17 Mai 2021
Pour sa réouverture le 4 juin, l’Opéra-Comique propose une nouvelle production de l’Orfeo de Monteverdi mis en scène par Pauline Bayle et dirigé par Jordi Savall. Une occasion de retrouver l’émotion de l’opéra naissant – et retrouvé en tant que spectacle vivant…
Orfeo est généralement considéré comme le premier opéra de l’histoire. Cette qualification, quoique mensongère, n’est pas complètement fausse. Depuis le moyen âge, on met en musique et en scène de courts épisodes bibliques dans les mystères et les miracles. Ce qui va cependant distinguer l’opéra des formes précédentes, c’est l’entière implication de la musique dans l’action théâtrale, sa participation à l’expression des sentiments des personnages, à la description des atmosphères, au développement de l’intrigue. Déjà en 1597, le compositeur, le compositeur Jacopo Peri proposait une mise en scène de la légende grecque de Dafne. Et le 6 octobre 1600, à Florence, pour la célébration du mariage de Marie de Médicis et d’Henri IV, il récidive avec Euridice, auquel assiste le duc de Mantoue, Vincent Ier de Gonzague qui, dit-on, bouleversé par ce genre nouveau, se pique de présenter à sa cour un spectacle de meilleure qualité. Il commande à son maître de musique, Claudio Monteverdi,un opéra. Ce sera Orfeo, le 24 février 1607
Une œuvre phare de l’humanisme
Dans un contexte de rivalités entre les grandes familles des principautés italiennes et de grands bouleversements économiques, sociaux et scientifiques (l’imprimerie de Gutenberg, les grandes expéditions, la révolution copernicienne...), les intellectuels, philosophes et artistes, mettant leurs pas dans ceux de l’Antiquité grecque, forgent un humanisme qui placent l’Homme au centre. Orfeo, tiré des Métamorphoses d’Ovide, dans lesquelles Orphée, incarnation du poète-musicien, incarne l’harmonie de l’univers, s’inscrit dans ce mouvement. La structure de cette « fable musicale » reprend la composition en cinq parties du théâtre antique, symétriquement organisées autour de l’acte central où se révèle le pouvoir de la musique lors de la descente d’Orphée aux Enfers. Le chœur, ici constitué de nymphes et de bergers, chante et commente l’action, et intervient à la fin de chaque acte pour conclure.
Une écriture musicale innovante
Mais Monteverdi ne se contente pas de marcher dans les pas de la Camerata fiorentina et de la référence à l’antique. Il ajoute des éléments novateurs à son écriture musicale. Contrairement aux usages de l’époque, il indique avec précision les instruments qui figureront dans l’orchestre et attribue à chacun d’entre eux un rôle dramatique : la flûte pour les scènes pastorales, les cornets et saqueboutes pour les enfers, les cordes pincées pour l’harmonie céleste ou l’orgue pour évoquer la mort. Il fait aussi cohabiter deux styles d’écriture : la polyphonie et la monodie accompagnée, propice à une cohésion texte/musique. Plus, il ne se contente plus de mettre en valeur les mots ou le livret, mais il vise à traduire par la musique et par le chant l’émotion de ses personnages. Il rompt ainsi avec la tradition du recitativo narrativo de Peri, proche de la déclamation, pour introduire le recitativo rappresentativo, musicalement plus riche et évoluant au fil des sentiments exprimés, et conjugue les diverses formes musicales de son époque en incluant aussi des chœurs polyphoniques, des danses et des ritournelles…
Autant de raisons pour lesquelles on lui attribue le titre de créateur de l’opéra, même si dans sa forme publique, il faudra attendre l’arrivée de Monteverdi à Venise et les représentations publiques pour que l’opéra devienne un genre à part entière…
Orfeo de Claudio Monteverdi. Favola in musica en cinq actes et un prologue. Livret d’Alessandro Striggio. Créé en 1607 à la cour de Mantoue
Direction musicale Jordi Savall. Mise en scène Pauline Bayle. Décors Emmanuel Clolus. Costumes Bernadette Villard. Lumières Pascal Noël
Avec : Luciana Mancini(Musica/Euridice), Marc Mauillon (Orfeo), Sara Mingardo (Messaggera), Marianne Beate Kielland (Speranza / Proserpina), Furio Zanasi (Apollo), Salvo Vitale (Caronte/ Plutone), Victor Sordo (Pastore I / Spirito II), Lise Viricel (Ninfa), Gabriel Diaz (Pastore II / Spirito IV), Alessandro Giangrande (Pastore III / Spirito I / Eco), Yannis François (Pastore IV / Spirito III). Danseurs : Yannick Bosc, Loïc Faquet et Xavier Perez
Orchestre Le Concert des Nations. Chœur La Capella Reial de Catalunya
Production Opéra-Comique. Coproduction Opéra Royal - Château de Versailles Spectacles, Opéra Grand Avignon
Dates et horaires des représentations
Vendredi 4 juin à 18h, dimanche 6 juin à 15h, lundi 7 juin à 18h, mercredi 9 juin à 20h, jeudi 10 juin à 20h
Jauges réduites. Ce spectacle sera capté par Fra Prod, diffusé en live le 10 juin par Mezzo et le 3 juillet par France Musique.
Opéra-Comique – 5, rue Favart – 75002 Paris
Tél. 01 70 23 01 31. Réservation : billetterie@opera-comique.com