2 Octobre 2018
L'Institut culturel italien manifeste, s'il en était besoin, à travers une série de concerts sur la place occupée par les jeunes générations italiennes dans la création musicale.
Francesco Dillon au violoncelle et Emanuel Torquati au piano ont été accueillis en résidence à Paris. Ils reviennent aujourd'hui pour nous offrir un parcours sans concession au cœur de la création contemporaine italienne. Un déroulé non exempt de surprises. Prenant le contrepied de «lyrique» souvent associé à la musique italienne, les jeunes compositeurs jouent ce soir-là nous faisons jouer une musique plutôt sobre et minimaliste, parfois heurtée et à coups, parfois en pots-de-vin à l'air libre qui se défait, dépend parfois des instruments dans un dialogue, Pas de mouvement ascendant menant vers un point culminant aux allures paroxystiques mais un parcours tout en pointillés et des silences dont la scansion n'est pas primordiale sur le mouvement.
Demeurait it a «presque rien» alors que ses racines sont dans la tradition italienne, un lyrisme contenu, intériorisé, sensible en particulier dans la lente, continue et délicate décroissance de la gamme sur la violoncelle dans Melencolia I , pratiquant sans coup-à-coups ni interruption par Le passage de l'archet sur l'instrument, une musicalité intense, qui sera décrite dans un continuum ininterrompu.
Hommage aux grands anciens
Comme dans un parcours à rebours, le concert remontait le temps vers Debussy, puis vers Fauré (pour le bis), comme pour répondre à la question que posait Gauguin : D’où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? À travers la dernière œuvre de Debussy – on fête le centenaire de la mort du compositeur – hommage était rendu à ce grand « paresseux » de la musique dont la Sonate en do mineur est une merveille. Grave et légère, nocturne et dansante, avec sa mélancolie traversée de touches d’humour, elle évoque ces « molles ombres bleues » qui « tourbillonnent dans l’extase d’une lune rose et grise » (Verlaine). Chez ce musicien du « peu » la Sonate sonne comme l’urgence de « dire », une dernière fois avant de disparaître, de rassembler l’ensemble de son vocabulaire musical, l’espace d’une dernière explosion qui offre une myriade d’images multicolores. Nos deux interprètes eurent là l’occasion de montrer leur talent et d’exprimer leur virtuosité, qui sont certains. Clore par Fauré cette remontée du temps était aussi rendre hommage à la délicatesse pointilliste qui donne parfois à la musique cette finesse inimitable et universelle.
Musique contemporaine oblige...
L’institut culturel italien avait déjà présenté la saison passée des concerts de musique contemporaine. Cette seconde édition sera complétée par un autre concert, le 5 octobre, interprété par Anna D’Errico, une pianiste exceptionnelle très investie dans la musique contemporaine, qui travaille avec les compositeurs de notre temps. Avec le partenariat de l’IRCAM, elle met en lumière cinq œuvres italiennes et françaises utilisant un piano « augmenté » par l’apport d’électronique et de transducteurs : « un trompe-l’oreille subtil » dont l’exploration s’avère pleine de promesses…
Le duo Dillon-Torquati en concert : Francesco Dillon (violoncelle), Emanuele Torquati (piano)
1er octobre 2018– Institut culturel italien (50 rue de Varenne – 75007 Paris)
Giacinto Scelsi : To the Master (1974)
Silvia Borzelli : Further In (2014)
Salvatore Sciarino : Melencolia 1 (1981)
Marco Momi : Unstill (2017)
Claude Debussy : Sonate en do mineur (1915)
Gabriel Fauré : Après un rêve (opus 7 n° 1, 1878)
Le 5 octobre, en collaboration avec l’IRCAM-Centre Pompidou
Musique contemporaine italienne et française
Anna D’Errico interprète Maurizio Azzan, Giulia Lorusso, Emanuel Palumbo, Daniele Bravi et Daniela Terranova
Réalisation informatique IRCAM : Mike Salomon