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Arts-chipels.fr

Mots pour maux – Ah ! mais vraiment, quel boulot !

Mots pour maux – Ah ! mais vraiment, quel boulot !

Des angoisses d’un morceau de gruyère enfermé dans un frigo à une déclaration d’amour à Mona Lisa, Sylvain Gary déclame en chantant toute la gamme des petits événements qui forment notre vie quotidienne avec un humour et un plaisir des mots contagieux.

Ils sont trois à se partager la scène avec leur air malicieux et leur grande complicité qu’on sent présente. Lui, l’auteur, a fait du rouge sa couleur. Chemise et baskets sont en accord avec le tabouret sur lequel il se perche parfois. Eux, ce sont les musiciens : François Martin, le compositeur et pianiste qui arbore sur la tête, à l’occasion, des accessoires cocasses et décalés. Elle, Antonella Mazza, la contrebassiste au bel accent chantant engloutie par son volumineux instrument. Tous deux commentent, par leurs mimiques, le texte que déroule, à perte de souffle, notre bateleur poète et inspiré.

Aux sources du cabaret

Tous trois se réapproprient les ressorts très anciens mais toujours efficaces du cabaret. Point ici de spectacle qui délivre son message à un public passif et consentant mais l’établissement d’une vraie complicité dans la joie et la bonne humeur qui lie la scène et la salle. C’est au spectateur que s’adressent les mimiques de Sylvain Gary, qui promène sur le monde son air émerveillé et ouvre grand ses mirettes de lou ravi, et les commentaires muets de ses acolytes. On retrouve ce qui a fait la joie de nos jeunes années, les rythmes qui ont bercé nos enfances, pop, blues, ritournelles populaires, un peu jazzy, du temps que les chanteurs savaient chanter et que les textes avaient une importance. Comme si on se trouvait plongé, en condensé mais différemment, dans un mix qui convierait Charles Trenet et les Frères Jacques, Bobby Lapointe et Renaud, Brassens et même Guy Béart… La gouaille d’un Gaston Ouvrard se désolant de sa « rate qui s’dilate », de son « foie qu’est pas droit » n’est pas loin, les comiques troupiers non plus, mais avec infiniment plus de finesse, un peu à la Raymond Devos enfilant ses jeux de mots sur le fil de l’absurde comme autant de perles qu’il faut saisir au vol avant qu’elles ne s’envolent.

(c) ChrisDé

(c) ChrisDé

Des textes à savourer sans vergogne

Qu’elle raconte l’histoire singulière d’une poupée gonflable qui se réjouit d’être enfin mise au rancart, les tribulations d’un voleur de nains de jardin, les errances du bon dieu qui fabrique Adam avec Adam avant de comprendre son erreur et de créer Ève – errare deus est –, d’une fille de bar qui suit un soir un borsalino qui se dit impresario pour se retrouver sur le trottoir, ou du penseur de Rodin qui s’interroge – évidemment… – c’est toute la gamme des menus tracas qui forme la trame de la vie qu’on trouve au rendez-vous. Et si pour finir vous vous interrogez sur ce que vous pourriez faire, question profession, pas si simple « d’trouver un bon boulot » : infirmier, « j’rue dans les brancards », boxeur, « c’est pas dans mes cordes », électricien, « c’est trop courant », quant à curé, « j’ai du mal à croire ». On l’aura compris : il y a de quoi enrichir son vocabulaire dans cette malicieuse évocation des travers de la vie. Pour le public, conquis, ce remue-méninges en chansons, impertinent et décalé, a une saveur délicate et sucrée…

Mots pour maux, de Sylvain Gary

Avec : Sylvain Gary, François Martin (piano), Antonella Mazza (contrebasse)

Du 29 août au 14 novembre 2018, les mercredis à 21h30

Théâtre Essaïon – 6, rue Pierre-au-Lard – 75004 Paris

Tél. : 01 42 78 46 42. Site : www.essaion.com

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